Le départ du Royaume-Uni sera-t-il l’occasion pour l’Union européenne de se relancer en s’unissant autour d’un projet commun ? La nouvelle présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, veut le croire. C’est dans cet esprit qu’elle propose de donner une dimension nouvelle à la lutte contre le changement climatique à travers un « pacte vert », qui doit à la fois prolonger et accentuer les efforts déjà accomplis par l’Europe. Le rebond attendu de l’Union européenne passerait ainsi par la bataille du climat, devenue la priorité des priorités.

C’est en 1986, en adoptant le traité connu sous le nom d’Acte unique européen, que l’UE a fait de l’environnement une composante des politiques communes. Un poste de commissaire européen chargé de l’action pour le climat a été créé en 2010 au sein de la Commission présidée par José Manuel Barroso et confié à la Danoise Connie Hedegaard. « Le changement climatique est l’enjeu déterminant pour notre génération », disait alors José Manuel Barroso.

La nouvelle finalité de l’Europe

Ses successeurs ont repris le flambeau. « Je voudrais que l’Europe soit à l’avant-garde de la lutte contre le changement climatique », déclarait Jean-Claude Juncker. A son tour, Ursula von der Leyen vient donc de lancer un ambitieux plan climatique dont elle a fait la pierre de touche de son programme. « Le pacte vert pour l’Europe est notre nouvelle stratégie de croissance », a-t-elle affirmé en présentant ses propositions. Son but est de parvenir à la neutralité carbone en 2050 pour que l’Europe devienne le premier continent climatiquement neutre.

L’UE entend montrer la voie au monde. « Avec son pacte vert, note l’économiste Jean Pisani-Ferry, la nouvelle présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, investit une grande part de son crédit politique dans la transition écologique ». Le Green Deal, ajoute-t-il, est devenu « la nouvelle finalité de l’Europe ».

En 2008, l’Union européenne s’était donné trois objectifs résumés par la formule 3 fois 20. Autrement dit, à l’horizon 2020, ses émissions de gaz à effet de serre devaient être réduites de 20% (par rapport à 1990), la part des énergies renouvelables dans sa consommation atteindre 20% et son efficacité énergétique, c’est-à-dire ses économies d’énergie, augmenter de 20%. Quelques années plus tard, en prévision de l’horizon 2030, ces chiffres ont été revus à la hausse : au moins 40% de réduction des émissions, 32,5% pour les énergies renouvelables et l’efficacité énergétique.

Le pacte vert vise à dépasser encore ces seuils, notamment en portant à plus de 50% le taux de réduction des émissions. Mais au-delà de ces calculs, ce qui importe est la volonté affichée par les Européens depuis plusieurs décennies de prendre leur part de la lutte contre le changement climatique.

Le pari de l’avenir

L’action pour le climat est désormais le grand projet européen. Ce projet est porté par des opinions publiques qui se mobilisent à l’appel des associations écologistes pour dire leur inquiétude et protester contre l’inertie de la plupart des gouvernements. Partout les partis verts progressent dans les urnes. Le succès de la jeune Greta Thunberg auprès d’une grande partie de la jeunesse témoigne de cette prise de conscience. Le moment n’a jamais été plus propice. « Nous sommes à l’aube d’une transformation sans précédent », ne craint pas d’affirmer Ursula von der Leyen.

La grande question est de savoir si la nouvelle présidente de la Commission sera capable de tenir les engagements qu’elle vient de prendre au nom de l’Union européenne. Son plan de « verdissement » de tous les domaines de l’économie – des transports à l’agriculture en passant par l’énergie et le bâtiment – coûtera cher. Elle propose que l’Europe investisse 1.000 milliards d’euros sur dix ans. Les deux gros chapitres du budget européen – les fonds structurels et la politique agricole commune – devront être consacrés pour une large part à la transition écologique.

Reste à convaincre les Etats, qui auront le dernier mot et qui, pour le moment, ne manifestent pas beaucoup d’enthousiasme. Il serait grave que l’UE déçoive ceux qui attendent d’elle, dans de nombreux pays, qu’elle donne l’exemple quand les autres grands acteurs de l’économie mondiale restent en retrait. Le pari d’Ursula von der Leyen est aussi celui de l’avenir.