En me penchant sur la question du ministère des femmes, j’ai pris conscience que le principe de « complémentarité des sexes » (selon lequel hommes et femmes ont été créé·es égaux·ales en valeur et en dignité, mais avec des caractéristiques spécifiques à leur sexe) qui m’avait été enseigné dans les milieux évangéliques depuis mon enfance, était tronqué. De mon expérience, il donnait souvent naissance à une hiérarchisation et des rapports inégalitaires entre les sexes. Dans les Églises évangéliques que j’ai fréquentées ou visitées, il me semblait que tous les postes à responsabilités étaient ouverts aux hommes, alors que les femmes n’avaient accès qu’à des domaines traditionnellement associés à leur sexe du fait de leur dimension dite « féminine » ou « maternelle », tels que la relation d’aide, l’accueil, la prière, l’enfance ou encore la mission.
La division sexuée des rôles et l’apparente difficulté des femmes à accéder au ministère pastoral, que j’observais dans le contexte des Églises évangéliques, m’a donné envie de consacrer mon mémoire à cette problématique.
Pour réduire mon champ de recherche, je me suis posée la question suivante : « Comment le ministère pastoral des femmes est-il vécu – et perçu – dans les Églises membres de la Fédération Romande des Églises Évangéliques (FREE) ? ».
Dans la suite de cet article, je vais tenter de vous présenter certaines des conclusions que j’ai tirées de la littérature existante et des données qualitatives récoltées lors d’entretiens avec des pasteur·es de la FREE, des étudiantes à la HET-PRO, l’ancien directeur de la FREE (Philippe Thueler), et Marie-Noëlle Yoder (co-fondatrice de « Servir Ensemble »).
De la théorie à la pratique
Tout d’abord, si aujourd’hui, le pastorat féminin semble, en théorie, être accepté dans la majorité des Églises évangéliques de Suisse romande – à l’exception des Églises dites conservatrices ou fondamentalistes – les chiffres témoignent d’une autre réalité1. On trouve des pasteures rémunérées dans moins de 10% des Églises évangéliques : les postes d’influence, associés au leadership spirituel, restent un bastion largement masculin et cela malgré le fait que les femmes représentent une majorité des membres au sein de la plupart des communautés évangéliques. Les femmes ne sont pas pour autant démissionnaires, elles sont très nombreuses à s’impliquer, bien que les postes auxquels elles ont généralement accès sont moins valorisés, car situés plus bas dans la hiérarchie ecclésiale, comme les postes administratifs.
Il s’agit maintenant de se demander pourquoi ?
Il semblerait qu’une part importante des chrétiennes évangéliques se disqualifient elles-mêmes du pastorat et choisissent de travailler dans le séculier et/ou de s’impliquer dans d’autres ministères ecclésiaux. Plusieurs facteurs permettent d’expliquer ce