À l’heure où va s’ouvrir une nouvelle Semaine de prière pour l’unité des chrétiens, on entend parler de lassitude œcuménique, d’hiver œcuménique, de découragement œcuménique… L’interview que nous a accordée André Birmelé montre qu’il est bon de prendre un peu de recul pour mesurer les extraordinaires avancées de ces dernières décennies, confirmant l’intuition du concile Vatican II lorsqu’il désigne l’œcuménisme comme un don de l’Esprit pour notre temps.
Revenons cent ans en arrière. Au début du XXe siècle, les premières préoccupations œcuméniques viennent des milieux missionnaires qui déplorent que la division des Églises décrédibilise le témoignage de l’Évangile. Ils proposent que les différentes Églises se mettent d’accord sur un socle commun afin de parler davantage de ce qui les unit que de ce qui les divise. En 1919, une délégation est envoyée auprès du pape Benoît XV pour lui présenter le projet. Dans un communiqué de presse, le Vatican déclare que l’Église catholique ne peut participer à ce mouvement parce qu’elle ne peut envisager de rencontrer d’autres Églises sur un pied d’égalité. Rome ne peut pas aller à elles, c’est à elles de revenir dans le giron de l’Église catholique. La seule solution à la division des Églises est le retour des brebis égarées dans la seule vraie Église.
Un siècle plus tard, le pape François écrit dans son exhortation apostolique La Joie de l’Évangile : « Étant donné la gravité du contre-témoignage de la division entre chrétiens, (…) la recherche de chemins d’unité devient urgente. (…) Si nous nous concentrons sur les convictions qui nous unissent et rappelons le principe de la hiérarchie des vérités, nous pourrons marcher résolument vers des expressions communes de l’annonce, du service et du témoignage. » Le pape joint le geste à la parole en vivant un œcuménisme de la fraternité avec les orthodoxes, les protestants, et même les pentecôtistes. Comment ne pas célébrer cette conversion ?
C’est parce que les mouvements identitaires ont tendance à se développer dans toutes les dénominations qu’il est important de se rencontrer, de travailler ensemble, de prier ensemble. Si on abandonne le combat œcuménique, on laisse le champ libre aux tendances sectaires qui conduisent aux exclusions réciproques, ce qui nous renverrait aux pages les plus noires de l’histoire des Églises. Si l’œcuménisme est un don de l’Esprit, ne pas pécher contre l’Esprit !