En cette période de Noël, intéressons-nous à Issa Ibn Maryam, Jésus fils de Marie, comme il est souvent désigné dans l’islam.
Ni Dieu, ni fils de Dieu, Jésus est le deuxième prophète le plus cité dans le Coran, après Moïse. Il est celui qui annonce la venue de Mohammed, qui accomplit des miracles et ne meurt pas. Dès le récit de sa naissance, le destin de Jésus est exceptionnel. Marie, sa mère, se retire à l’écart de sa famille et reçoit la visite de l’ange Gabriel qui lui annonce sa maternité, le récit en est fait dans la sourate de Marie (1). La mère de Jésus est l’une des quatre femmes modèles (2) du Coran, par sa pureté. Comme dans le récit biblique, la conception et la naissance de Jésus sont miraculeuses. On ne sait pas combien de temps dure la grossesse ni comment il vient au monde, et ses premiers mots sont prononcés dès le berceau. Il accomplit d’autres miracles dans sa vie, comme la guérison des malades ou la résurrection des morts.
Jésus, un prophète humain ?
Le nom de Jésus est souvent suivi de « fils de Marie », le Coran insiste en effet sur son humanité. Comme les autres prophètes, Jésus n’est pas Dieu ni divin. Il occupe néanmoins une place particulièrement importante, en étant le dernier prophète avant Mahomet, dont il annonce la venue. Jésus vient confirmer ce qui a été dit avant lui par les autres prophètes, à savoir qu’Allah est l’unique Dieu, énonçant ainsi le premier pilier de l’islam (3) : « nul ne mérite d’être adoré à part Dieu » et « Mohammed est le messager de Dieu ». Le Coran fait état de 124 000 nabi (prophètes), parmi eux 313 rasul (envoyés). Vingt-cinq seulement sont cités dans le Coran, dont les cinq plus importants : Abraham, Noé, Moïse, Jésus et Mohammed. « On peut parler de la nature miraculeuse de Jésus mais pas divine, ou alors dire que tous les humains sont divins car ils émanent de Dieu, et donc Jésus a fortiori », résume Eric Geoffroy, professeur en islamologie à l’Université de Strasbourg, à propos de la nature de Jésus dans le Coran. S’il a bien une mère humaine – Marie -, Jésus n’a pas de père. De ce fait, sa naissance est presque aussi exceptionnelle que celle d’Adam, entièrement créé par Dieu.
Jésus n’est pas mort sur la croix
L’autre grande différence entre le Coran et la Bible à propos de Jésus concerne sa mort. Le Christ est condamné à la croix dans les deux textes, mais pour les musulmans, Allah l’élève à lui (4). Jésus n’est donc pas mort de mort humaine et le Coran annonce qu’il reviendra à la fin des temps pour lutter contre l’Antéchrist. « Le texte musulman reste assez évasif, comme souvent, ce qui donne lieu à plusieurs interprétations », nous apprend Éric Geoffroy. Certains disent qu’un autre, Judas peut-être, aurait été crucifié à sa place, sous ses traits ; pour d’autres, l’enveloppe charnelle de Jésus a été crucifiée, mais pas son esprit, qui était déjà remonté au Ciel. Dans tous les cas, cette négation de la mort du Christ montre le triomphe final de l’espérance, de Dieu qui soutient toujours la foi des justes. Ainsi, l’élévation du Christ peut être vue comme un accomplissement et une promesse du pouvoir divin, comme on peut le lire dans Le Christ selon le Coran d’Ali Merad, professeur à la Sorbonne, spécialiste de la pensée islamique moderne. Une telle interprétation de l’élévation de Jésus par Allah n’est pas sans faire écho à la résurrection que confessent les chrétiens.
(1) Sourate 19, versets 16 à 35.
(2) Marie, mère de Jésus ; Assia, femme de Pharaon ; Khadija, femme du Prophète Mahomet ; Fatima, fille du Prophète.
(3) L’islam comporte 5 piliers : la profession de foi, la prière, l’aumône, le ramadan, le pèlerinage à La Mecque.
(4) Sourate 4, versets 157 à 159.