Luther n’a pas été, comme tant de ses contemporains, un enfant contraint d’entrer dans l’Église. Bien au contraire. Son père, qui était issu d’une modeste famille de paysans, voulut que son fils s’élève dans la société en faisant du droit civil. Né en 1483, le jeune Martin va à l’école de la cathédrale de Magdebourg puis à celle d’Eisenach, enfin à l’université d’Erfurt où il poursuit ses études jusqu’à sa première rupture : pris dans un orage sur une route et voyant la foudre tomber à quelques pas de lui, il fait vœu à sainte Anne de rentrer dans les ordres s’il en réchappe. Bravant le désaccord de son père, il entre en 1505 chez les augustins d’Erfurt.
Une âme en recherche
Déjà licencié en philosophie, il suit désormais des cours de théologie dans un couvent où a été restauré une règle sévère. Il se rend une première fois à Wittenberg en 1508 pour y expliquer Aristote, revient à Erfurt puis va à Rome en 1510. À la fin de 1512, il est docteur en théologie et commence son enseignement à l’université de Wittenberg en commentant le Psautier puis l’épître aux Romains. Malgré cette carrière solide, en apparence sans histoire, Luther connaît en réalité une crise religieuse depuis au moins son entrée au couvent. Consciencieux et scrupuleux, il s’efforce d’être un bon moine et de concilier l’enseignement contradictoire qu’il a reçu et qui proclame tour à tour la valeur des œuvres humaines et l’arbitraire du jugement divin (E. Léonard).
Pour trouver des réponses, Luther va chercher avec ardeur auprès de plusieurs sources, dont saint Augustin qui lui donnera de nombreuses pistes de réflexion, en particulier sur l’action toute puissante de la Grâce. Mais c’est la Bible, qu’il a pu consulter dès son entrée au couvent, sur laquelle il s’appuie en priorité pour sa doctrine du Salut. Tout cela se fait lentement, dira-t-il : Comme Augustin, j’ai été du nombre de ceux qui ont progressé en écrivant et en enseignant. En 1516, il proclame que l’homme se justifie par la foi seule, les œuvres (bonnes actions et morale), sont le fruit de la foi. Il pose aussi les bases de ce qui sera le principe du sacerdoce universel.
Le courage d’un homme
Ces convictions, Luther voulut d’autant plus les transmettre qu’un prédicateur d’indulgences vint faire une tournée à Wittenberg en 1517, tandis que le duc de Saxe exposait ses reliques à l’église pour la Toussaint. Le prédicateur, l’ineffable Tetzel, assurait par exemple qu’il avait la puissance de remettre le péché de qui aurait engrossé la Sainte Vierge ou que les âmes bondissaient hors du feu du Purgatoire lorsque l’argent tintait dans sa caisse ( !) Bonne occasion pour afficher les 95 thèses sur la porte de l’église ; cette démarche n’avait rien de scandaleux, la porte servant à l’Université à afficher les nouvelles. Cependant, malgré les critiques des indulgences, Luther ne rompt pas avec l’Église ni le pape : L’Esprit saint nous fait du bien par le pape (thèse 9). L’action de Luther fit quand même très vite du bruit, attirant beaucoup de fidèles à ses cours mais suscitant aussi des oppositions violentes.
Luther, à ce stade, est tout d’abord un pécheur sauvé qui veut faire connaître à toutes les âmes chrétiennes le Salut qu’il a reçu (E. Léonard). En d’autres termes, c’est un homme qui est parti de sa recherche théologique personnelle pour édifier peu à peu une doctrine universelle. S’il n’imagine pas que le pape puisse s’opposer à la vérité qui lui est apparue, il faudra qu’il l’admette, ce qui renforcera sa détermination, surtout après son excommunication, prononcée en 1520, et qui entérine la rupture définitive avec Rome.
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