Le dos se courbe, la tête s’abaisse, l’être se sonde intérieurement. Dans ce mouvement d’enracinement que vivent aussi les arbres en hiver, pointe la rumeur d’un changement souhaité, la promesse d’un printemps de la foi que nul ne peut encore sentir, mais que chacun espère. Or le printemps surprend, il paraît violent. Tout à coup l’on prend conscience de sa présence et l’on se laisse emporter dans la valse sans l’avoir vue venir.

Violence ou tension

Y aurait-il donc une bonne violence, explosion de vie jaillie de la souche aride de Jessé ? On pourrait le croire, à considérer la puissance renversante d’un témoignage ou d’une rencontre. Pourtant, la violence reste violence et porte en elle le mot viol. Toute tentative pour minimiser ou embellir ses effets n’y changera jamais rien. Car la violence n’est pas une réalité, c’est un ressenti, un sentiment ou une intention. L’actualité montre combien une situation de privation peut être vécue comme un viol de liberté ou un investissement pour l’avenir, suivant ce qu’on en vit. Au terme de violence, je préfère le terme de tension, qui ne véhicule ni sentiment ni intention. C’est bien la tension intérieure du bourgeon qui le fait exploser, libérant le printemps. Dans la découverte à Pâques du tombeau vide, la tension importe plus que les faits, les ressentis ou les intentions. La seule question qui vaille est de savoir si une sève irrigue ou non le cœur des disciples, si elle en fait craqueler la sécheresse ; que cette sève s’appelle d’ailleurs confiance, foi, ou Saint-Esprit.

Re-dresser, Ré-susciter, Ré-veiller

Ces mots sont ceux des évangiles pour dire Pâques, comme trois temps d’une valse où l’humain se relève. Se dresser, être suscité ou veiller, ne serait-ce pas la vocation de chacun, répondant à la violence des Hommes par le « lève-toi et va » de Dieu à son peuple ? Se dresser dans sa vie pour en affirmer le sens, susciter en soi l’action, veiller sur soi et sur ses frères. Pâques est un redéploiement de l’humain dans l’Homme. Une tension féconde.