La première serait de perpétuer la rupture historique avec le rite catholique, grand prescripteur de gestes collectifs comme l’agenouillement, les mains jointes, le signe de croix, la réception bouche ouverte de l’hostie consacrée, voire la prosternation du prêtre lors d’une ordination.

Le culte réformé se devait donc d’être concentré sur l’écoute de la Parole et des prières, le chant des psaumes et des cantiques. Il ne s’autorisait finalement que l’alternance des postures assises et debout pour le chant et certains actes liturgiques comme l’an- nonce de la grâce ou la bénédiction.

Un marqueur identitaire

La seconde détermination fut de se démarquer de fidèles, protestants mais désireux d’exprimer plus physiquement leur foi durant le culte : rappelons que des « prophètes » cévenols, rescapés de la guerre des camisards et réfugiés en Angleterre, furent à l’origine du mouvement des Shakers (« trembleurs »), rapidement rejetés par les Églises protestantes historiques au point de migrer en Amérique. Plus récemment, des courants pentecôtistes ou charismatiques ont accordé une place éminente à une gestuelle parfois spectaculaire, vécue comme les signes de la présence de l’Esprit. 

La gestuelle, limitée ou débridée, devient alors un marqueur identi- taire, illustrant la diversité protes- tante de façon parfois peu fraternelle : en milieu réformé, ne surnomme-t-on pas les fidèles évangéliques « les dévisseurs d’ampoules » parce qu’ils prient debout, bras levés et en tournant leurs doigts ?

Et pourtant, les gestes sont loin d’être absents des cultes des Églises dites « historiques ». Rappelons que le culte luthérien, moins en rupture du catholicisme que le culte calviniste, admet le signe de croix de la part de pasteurs ordonnés, seuls habilités à célébrer la Cène.