Elle a résisté dans le temps Autrement appelée « veillée pascale », la vigile est un moment fort dans la liturgique luthérienne. Elle a connu deux déclins. D’abord au moment de la guerre de Trente Ans, puis au XVIIIe siècle, avec le rationalisme. Heureusement, la Première Guerre mondiale a conduit au renouveau liturgique des communautés luthériennes. Ainsi, les Églises protestantes l’ont redécouvert au XXe siècle, dans le cadre des renouveaux liturgiques qui ont mené à des publications spécifiques, distinctes des ordres du culte dominical. Dès les années 1960, la vigile pascale s’est généralisée en paroisse et inscrite dans les liturgies officielles.
Son déroulement actuel
Dans le rituel luthérien, la vigile pascale commence en extérieur par l’allumage au feu pascal du cierge du même nom et la lecture de douze textes bibliques possibles. Elle se poursuit par une procession d’entrée dans l’église, cierges en main, l’église dans la pénombre, sous la louange pascale, avec le chant de l’Exultet, qui est un chant joyeux de Pâques. Puis, on allume les lumières de l’église. S’ensuit la possibilité de baptême et de confirmation, ainsi que le rappel des vœux du baptême pour chaque participant. La célébration se conclut par la sainte cène. Une fois la veillée terminée, la communauté se retrouve pour un temps convivial et la célébration du culte de Pâques.
Une liturgie spéciale à un moment spécial
La vigile se déroule de nuit, entre le coucher du soleil du Samedi saint et le lever du soleil, au matin de Pâques. Aujourd’hui, pour des raisons pratiques, elle est souvent célébrée à l’aube de Pâques. La vigile pascale constitue un temps fort dans l’année ecclésiastique et se vit avec ferveur et recueillement. Au cours de la cérémonie, l’accent est mis sur le rôle de la lecture des textes bibliques, des chants collectifs, dont « À toi la gloire », ainsi que la sainte cène. Dans le recueil liturgique actuel de la communion protestante luthéro-réformée, la vigile pascale est appelée « Nuit de Pâques ». On lit dans la prière d’accueil du propre de l’office : « … À l’aube de ce nouveau jour, nous allons revivre le mystère pascal : nous allons écouter son annonce dans les Écritures, nous souvenir de notre baptême, et confesser solennellement notre foi au Christ… »
Ainsi, dès l’accueil, l’assemblée sait ce qu’elle va vivre.
Qu’apporte la vigile pascale au croyant ?
Est- elle obligatoire, utile ? À cette question, le pasteur Dominique Calla me répond : « Chère Esther, comme pour toute pratique cultuelle en milieu luthérien, la liberté fondamentale du chrétien est totale. C’est en conscience et librement que je décide de vivre, ou non, ce temps qui m’est proposé dans mon parcours spirituel et ma vie de foi. Ce qui m’apparaît important dans la vigile pascale, c’est l’incarnation du mystère de Pâques. Se lever tôt, très tôt… Faire Église avec mes frères et sœurs à une période de l’année où la froidure printanière se fait encore ressentir dans la nuit, celle de la mort et de tous les dangers, pour allumer une lumière. À cette lumière unique, chacun se réchauffera un temps, dans l’écoute des textes bibliques. On en transportera une partie pour la diffuser autour de soi, comme la proclamation de l’éveil du Christ s’est diffusée. »
Dominique conclut : « Vivre cela, n’est évidemment pas une obligation, ni même très utile théologiquement, mais, totalement indispensable à mon émotion spirituelle, pour une mise en mouvement de ma foi, autrement. »