Ce grand rassemblement protestant, organisé chaque année le premier dimanche de septembre sur les terrains du musée du Désert, accueille entre 10 000 et 15 000 personnes dans une ambiance à la fois recueillie et joyeusement familiale.
Les protestants français ne sont pas une espèce confinée dans les déserts des Cévennes. Tout au long de leur histoire, ils se sont tournés vers des espaces libres, au-delà des mers, à la recherche de refuges ou de nouveaux horizons d’évangélisation.
Un peu d’histoire
La première Assemblée eut lieu le 24 septembre 1911, lors de l’inauguration du musée par ses fondateurs, Franck Puaux et Edmond Hugues. Depuis cette date, tous les ans à l’exception de quelques années de guerre, se tient l’Assemblée du Désert. Les participants viennent principalement des Cévennes et du Languedoc, mais très nombreux aussi de toute la France et de l’étran- ger, des pays du Refuge et de plus loin encore – certains Coréens ont même été accueillis l’an dernier sous les chênes et les châtaigniers du Mas Soubeyran.
Le moment essentiel de la journée est le culte du matin ; cette année celui-ci sera conduit par la pasteure Céline Roehmer. L’après- midi a lieu une fête sur un sujet qui varie chaque année, tantôt commémoration d’un événement (l’an dernier la Saint-Barthélémy, en 2018 Marie Durand), tantôt autour d’une figure de l’histoire du protestantisme (par exemple, en 1983, le 500e anniversaire de la naissance de Luther).
Voyage terrestre et maritime
Cette année, le titre « Voyageurs sur la terre… et la mer » nous propose de nous rafraîchir la mémoire. Marianne Carbonnier- Burkard, historienne du protestantisme et professeur honoraire à la Faculté de théologie protestante de Paris, en explique l’origine. En effet, qui se souvient encore du livre de Jean de Léry, « l’histoire d’Un voyage faict en terre de Brésil », demande-t-elle ? Il raconte que Calvin avait fait le rêve de fonder une colonie réformée dans la baie de Rio de Janeiro. L’auteur de ce récit est devenu pasteur 20 ans après cette expédition dont le but était de créer à la fois un refuge et une mission. Pour Claude Lévi- Strauss, ce récit fut décisif. Plus proche de nous, l’histoire des réfugiés huguenots est mieux connue : après la révocation de l’édit de Nantes beaucoup s’en allèrent voguer vers les îles britanniques, l’Amérique ou l’Afrique du Sud. Toute cette histoire « haletante » sera évoquée l’après-midi par les historiens Franck Lestringant et Gilles Vidal.
Impressions d’un habitué
Certains protestants y viennent tous les ans et ressentent un attachement puissant pour l’atmosphère d’unité, de fraternité et de partage qui est le propre de l’événement. Ainsi Denis Zuber, paroissien de Paris- Béthanie mais natif de la région, y retrouve sa famille et ses attaches cévenoles. Pour lui, il s’agit d’une fidélité au protestantisme, d’un devoir de mémoire, d’un retour aux grandes assemblées du passé. Et comme le culte est entrecoupé de vieux cantiques de son enfance issus de Louange et Prières (ou même plus anciens encore), le sentiment de faire partie d’une grande famille ne peut que provoquer une émotion palpable par tous. Y contribue aussi le fait d’être assis non pas dans de confortables fauteuils mais par terre ou sur quelque rocher peu moelleux, ce qui accentue le recueillement et le sentiment d’une ambiance de fraternité, sentiment intimement lié à ce grand rassemblement protestant.