La science nous apprend que biologiquement, nous ne sommes que des animaux comme les autres. Pourtant, il semble que les recherches sur la transformation du corps et bientôt du cerveau soient sans limites. Le musée de l’Homme, qui s’affirme de plus en plus comme un « musée de société », lance une réflexion passionnante et dérangeante sur notre évolution.

Remplissez la terre et soumettez-la (Ge 1.28)

L’exposition se divise en plusieurs parties. La scénographie passe de l’homme/animal au champion, au mutant, au cyborg puis à l’immortel… en montrant l’évolution du corps humain depuis la préhistoire. Elle finit sur l’état préoccupant de notre cadre de vie, la planète Terre.

Pour illustrer ces thèmes, les commissaires de l’exposition ont fait appel à des spécialistes dans des domaines variés, comme des médecins, anthropologues, ethnologues, réalisateurs et philosophes, puis à des artistes qui ont bien souvent créé des œuvres spécialement pour l’occasion. Le parcours montre un recul permanent des limites, depuis ceux qui se demandent s’il y a une distinction entre l’Homme et l’animal, jusqu’aux anxieux en quête d’immortalité qui injectent actuellement des milliards de dollars dans la recherche.

Pour le visiteur chrétien – ou simplement croyant en un dieu créateur –, il manque quelque chose sur l’âme et les origines, questionnement considéré probablement comme beaucoup trop explosif par les organisateurs. Car ce qui caractérise l’humanité pourrait tout simplement être ce qu’aucun animal ne conçoit, la préoccupation de l’au-delà, qui s’est traduite par l’apparition de sépultures organisées.

Tu es poussière et tu retourneras à la poussière (Ge 3.19)

À travers le parcours de l’exposition, on mesure toutes les avancées qui permettent de soigner les maladies et faire reculer l’âge de la mort. Aujourd’hui il est question d’Homme augmenté, c’est-à-dire d’un organisme humain greffé avec de la mécanique et de l’électronique. Ce qui amène à se poser une question véritablement vertigineuse : à partir de quand l’Homme sera-t-il à l’origine de sa propre création ? Est-ce quand on pourra être doté de plusieurs organes fabriqués en usine ? Quand on commencera à toucher au cerveau ? Et que dire de la procréation assistée ? Que pourrait entraîner une gestation dans un utérus artificiel d’embryons génétiquement modifiés ? Pour tout cela, des expériences sont déjà en cours.

Ces avancées scientifiques, que la loi ne peut qu’essayer d’encadrer du mieux possible (en France en tout cas), sont mises en perspective dans le dernier espace qui dépeint l’état inquiétant de la terre. Si notre habitat se détériore, il est vain de vouloir prolonger notre existence. Plusieurs choix sont possibles, de l’indifférence (business as usual, les découvertes scientifiques nous permettront de trouver une solution), au combat personnel (organiser les îlots de survie dans des bunkers, explorer d’autres planètes), ou lutter collectivement pour soigner notre planète.

Une réflexion spirituelle est plus que bienvenue à la sortie. Même si le visiteur peut trouver que la démarche du musée est orientée, les questions posées sont pertinentes. Et l’on ne peut s’empêcher de revenir aux premiers chapitres de la Genèse, qui affirment la supériorité de l’Homme sur les autres créatures avant d’annoncer son destin inexorable, qui est de retourner à la poussière.