Comme une multitude de clercs et de laïcs, je suis aujourd’hui submergé par une vague de consternation et de dégoût devant les découvertes de la commission Sauvé que révèle la publication de son rapport.

Mais je suis en outre très étonné de ce qui nous est rapporté de la déclaration du président de la Conférence des Évêques de France sur France Info selon laquelle Mgr de Moulins-Beaufort aurait dit que « le secret de la confession est plus fort que les lois de la République ». Car, au moins dans les années 50 à 60, on enseignait dans les séminaires de France une éthique de l’absolution dont on peut dire pour le moins qu’elle n’a été respectée ni dans l’esprit ni dans la lettre pendant la période couverte par l’enquête de la commission Sauvé.

Placer face à la société

De quelle éthique s’agissait-il ? Il s’agissait tout simplement de respecter à la fois le secret absolu de la confession et de placer le pénitent devant sa responsabilité face à la société.

En cas de faute grave ou d’acte criminel selon les lois de la République, le confesseur devait refuser l’absolution à un pénitent aussi longtemps que ce pénitent ne se serait pas lui-même et de son plein gré dénoncé à la justice. On notera que plusieurs prêtres de ma génération, consultés par mes soins pour savoir s’ils avaient le souvenir d’un tel enseignement, m’ont confirmé l’avoir également reçu en son temps.

Comme on peut difficilement imaginer que des clercs puissent rester longtemps et en bonne conscience dans une position où l’absolution leur a été refusée, on peut penser que bien des cas de récidive d’abus sexuels constatés aujourd’hui n’auraient pu se reproduire… à moins que de tels abus n’aient été considérés par les confesseurs comme de simples « péchés véniels », ou à moins que cette doctrine touchant l’absolution ait été réservée aux seuls pénitents laïcs… !

Quel enseignement éthique?

En outre, le respect de l’esprit de cette règle éthique aurait dû conduire la hiérarchie, dans le cas de rumeur ou de plainte, à conduire une enquête au terme de laquelle le coupable aurait dû être convoqué par son supérieur et enjoint de se présenter spontanément à la justice civile.

Je suis donc conduit à me demander quel enseignement ont reçu nos évêques en matière d’éthique de l’absolution au cours de leur formation… ou selon quel processus ils auraient été conduits à s’en écarter dans leur ministère… et je suis en outre quelque peu surpris par le fait qu’une telle doctrine ne semble pas avoir été portée à la connaissance de la commission Sauvé…

En résumé, je dirai seulement que la hiérarchie de notre Église disposait d’une doctrine éthique parfaitement articulée, et compatible avec le droit pénal de notre pays, qui lui permettait d’agir, et elle ne l’a pas fait, elle est donc gravement coupable.