Presque tous les ans, le 8 mars, je reçois de la part d’un ami un texto : Bonne fête des femmes ! Si, je n’en doute pas, l’intention se veut louable, ce message est le parfait exemple de la confusion occasionnée par cette journée. Car s’il s’agit bien de se concentrer sur les femmes, il s’agit surtout de pointer du doigt les inégalités dont les femmes souffrent à travers le monde aujourd’hui.

Un triste état des lieux

Car une notion souvent oubliée, c’est que le 8 mars ne s’intéresse pas uniquement aux femmes d’Occident. Ainsi, il est important de noter que selon l’UNICEF, en 2016, près de 200 millions de femmes à travers le monde avaient été victimes d’excision (1). En 2014, l’UNICEF estimait à 700 millions le nombre de femmes mariées de force avant leurs 18 ans, dont 250 millions avant leurs 15 ans (2). Plus proche de nous, une femme sur trois est encore tuée tous les jours sous les coups de son conjoint, représentant ainsi 14,5 % des homicides, selon le site de l’égalité femmes/ hommes du gouvernement (3).

Malgré ce triste bilan, nombreux et nombreuses sont les détracteurs·trices de cette journée pourtant indispensable. Entre ceux ou celles qui réclament une « fête des hommes » pour être « vraiment » à égalité, ceux ou celles qui estiment qu’on n’a pas à se plaindre maintenant qu’on a tous les mêmes droits ou encore ceux et celles qui clament qu’une seule journée ne sert à rien parce qu’il faut que ça soit pris en compte toute l’année (sur ce point, on peut leur accorder d’avoir vu juste), il devient difficile de faire entendre la réalité des femmes dans le monde au XXIe siècle.

Une représentation à changer

Comme si cela ne suffisait pas, l’initiative lancée par les Nations unies est souvent détériorée par des appellations inexactes et confuses, ainsi qu’un marketing au goût douteux. En plus de distraire l’attention du message initial, ces initiatives commerciales ont pour effet de faire perdurer les clichés sexistes, patriarcaux et archaïques de la femme obsédée par son image ou par la bonne tenue de son foyer. Car comme pour la fête des mères, certains magasins n’hésitent pas à faire des promotions spéciales sur la lingerie, les cosmétiques ou pire, l’électroménager, incitant les femmes à « se faire plaisir » parce que leur vie est dure. Ainsi, pour le 8 mars 2017, la marque de lingerie Etam a mis en place une réduction « une culotte offerte pour un soutien-gorge acheté ». Les appellations de type « Journée de la femme » ou « Fête des femmes » renvoient elles aussi un message loin du but voulu par le 8 mars : faire observer l’état du droit des femmes dans le monde, entre inégalités de salaires, féminicides, violences, accès à l’éducation…
Ce traitement médiatique de la Journée internationale du droit des femmes montre clairement que la société dans laquelle nous vivons est encore sous le joug d’un patriarcat aussi subtil que bien implanté. Il illustre bien que, encore une fois, notre société choisit de faire l’autruche et de rester sourde aux problèmes réels de plus de la moitié de sa population. Alors, ce 8 mars 2018, n’envoyez pas de texto de « bonne fête » à vos amies ou de fleurs à votre femme. Pensez à elles autrement. Et pensez à toutes les autres et à ce que vous pourriez faire pour toutes.