L’évangile du dimanche 15 décembre
Luc 3. 10-18 – La prédication du baptiseur
Introduction
Dimanche dernier, nous avons vu que le baptiseur était décrit dans les catégories des prophètes du Premier Testament, l’évangile de ce dimanche donne un aperçu de sa prédication. Il a une parole de prophète en appelant ses interlocuteurs à la droiture et à la justice.
Points d’exégèse
Attention sur deux points.
Titre : Que devons-nous faire : un peuple qui écoute
Devant la parole du prophète, il y a ceux qui veulent le faire taire et ceux qui écoutent. Comme le peuple est dans l’attente (v.15), il a la sagesse de demander ce qu’il doit faire, ce qui est la marque d’une démarche de foi.
L’attitude de la foule nous enseigne. Quand on ouvre une page d’Évangile, toujours se demander : que dois-je faire pour vivre ce qui est enseigné ?
Titre : Jean désigne un autre que lui-même
Quand le peuple se demande si Jean n’est pas le messie attendu, il s’efface pour désigner un autre que lui-même : ce serait trop d’honneur pour moi de délier la lanière de ses sandales.L’iconographie le désigne souvent avec le doigt pointé sur le Christ.
L’histoire montre que les disciples de Jean vont être en concurrence avec ceux de Jésus. Malgré cela, le baptiseur à l’humilité de s’effacer devant celui qui est plus grand que lui. En cela, il fait œuvre d’humilité. La vraie humilité ne consiste pas à s’abaisser soi-même, mais à élever les autres.
Pistes d’actualisation
1er thème : Prédication du baptiseur
À la réponse : Que devons-nous faire ? Jean répond par quelques règles de droiture et de générosité, partager sa tunique et sa nourriture, ne pas exiger plus que ce qui est demandé, ne faire de violence à personne et n’accuser personne à tort. Il s’agit en somme de la morale naturelle, ce qui rappelle le verset qui résume la partie pratique du sermon sur la montagne : Tout ce que vous voulez que les gens fassent pour vous, vous aussi, faites-le de même pour eux (Mt 7.12). Parfois cela paraît simple, mais comme le disait un sage à quelqu’un qui lui faisait remarquer que la règle était trop facile : « Un enfant de huit ans le sait peut-être, mais un vieillard de quatre-vingts ans a du mal à le mettre en pratique. »
La démarche éthique consiste à écouter son désir et à l’appliquer au prochain : Tu veux être aimé, aime ; tu veux être écouté, écoute ; tu veux être honoré, honore ; tu veux être aidé, aide ton prochain. Jésus a raison, c’est là la Loi et les Prophètes.
2e thème : L’Esprit et le feu
Le baptiseur dit du Christ : Lui vous baptisera dans l’Esprit saint et le feu.
L’Esprit est le souffle de Dieu promis par le prophète Ézéchiel : Je vous donnerai un cœur nouveau et je mettrai en vous un souffle nouveau ; j’ôterai de votre chair le cœur de pierre et je vous donnerai un cœur de chair. Je mettrai mon souffle en vous et je ferai en sorte que vous suiviez mes prescriptions, que vous observiez mes règles et les mettiez en pratique (Ez 36.26-27). Le souffle de Dieu est ce qui nous donne l’intelligence des Écritures, voir le monde comme Dieu le voit, le comprendre comme il le comprend.
Le feu est un symbole de jugement ou de purification. Jésus l’évoquera en lien avec la croix :Je suis venu mettre un feu sur la terre ; comme je voudrais qu’il soit déjà allumé ! (Lc 12.49-50).
3e thème : Le jugement
Il a sa fourche à la main, il va nettoyer son aire ; il recueillera le blé dans sa grange, mais il brûlera la paille dans un feu qui ne s’éteint pas, ce qui est une autre évocation du jugement de Dieu. Il y a deux façons d’aborder cette notion.
On peut comprendre le jugement comme la séparation entre les justes et les injustes, c’est la vision qu’en a le Baptiseur, mais ce n’est pas sûr que ce soit celle du Christ.
Une autre façon de comprendre le jugement l’interprète comme la séparation entre le juste et l’injuste qui se partagent notre vie. Lu de cette façon, le jugement devient la purification qui brûle tout ce qui n’est pas important pour ne laisser subsister que le meilleur dans une vie.
Quand l’Esprit souffle sur une histoire, qu’est-ce qui demeure ? Le jugement nous aide à faire le tri entre ce qui est important et ce qui relève de la futilité.
Une illustration : La Bonne nouvelle du jugement
Au commencement de ma vie de foi, je n’étais pas à l’aise avec la notion de jugement car j’y voyais la marque d’un Dieu justicier. En avançant en âge, je me suis réapproprié cette notion car elle est la conséquence de la dignité de ma personne. Devant Dieu mes choix de vie et mes combats ne sont pas indifférents. Je peux appeler la relecture de mon histoire devant Dieu car je sais que j’ai un bon avocat.
Le texte de l’épître aux Philippiens du dimanche 15 décembre
Philippiens 4.4-7 – Réjouissez-vous toujours
Le commandement de la joie
Le contexte – L’épître aux Philippiens
L’épître aux Philippiens est une épître de captivité, Paul l’a envoyée à l’Église de Philippe alors qu’il est en prison. Il ne connaît pas son avenir et il envisage la possibilité d’être mis à mort.
La situation pourrait être dramatique, pourtant c’est aussi l’épître qui parle le plus de la joie, notamment dans le passage proposé à notre méditation qui appelle à être toujours joyeux. Et pour être sûr qu’on a bien entendu ce qu’on a lu, il insiste : Réjouissez-vous toujours dans le Seigneur ; je le répète, réjouissez-vous !
Que dit le texte ? – Soyez toujours joyeux
La joie dans la Bible ne dépend pas des circonstances extérieures. Le théologien Henri Nouwen a écrit que la joie relevait d’une discipline spirituelle et qu’à tout moment « le cœur humain doit choisir entre le désespoir et l’espérance, entre la soumission à la puissance des ténèbres et le défi de tendre à la lumière, entre les représailles et la libération. C’est un choix intérieur qui ne dépend pas des conditions extérieures mais de la volonté de revendiquer sa liberté, quelles que soient les circonstances. Appeler le Dieu de la vie au cœur des ténèbres, tenir à la joie en marchant dans une vallée de larmes, parler de paix alors que les clameurs de guerre retentissent – voilà ce qu’il en est de la prière. » Comme le dit le proverbe chinois : « Si vous ne pouvez empêcher les oiseaux de la tristesse de voler au-dessus de vos têtes, vous pouvez toujours les empêcher de faire leurs nids dans vos cheveux ! »
Ces réflexions nous interrogent car enfin, comment la joie peut-elle se commander ? Et a-t-on déjà vu quelqu’un refuser d’être joyeux ? Ces questions nous obligent à aller plus loin dans notre compréhension. Si la joie est une vertu, elle nécessite un entraînement, un effort : c’est un travail, au moins sur nous-mêmes.
Au-delà des plaisirs et des désirs, la joie est un fruit de l’esprit, une écoute et un accueil au oui fondamental que Dieu prononce sur notre existence. Ce oui n’est pas à aller chercher dans les sommets de la sainteté, il est à recevoir dans la simplicité de notre quotidien selon cette réflexion de Bonhoeffer : « La joie de Dieu est passée par le dénuement de la crèche et la détresse de la croix : c’est pourquoi elle est invincible, irrésistible. Elle ne nie pas la détresse là où elle se trouve, mais au sein de cette détresse, en elle, elle trouve Dieu. »
Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – L’enseignement de Jean
Nous avons besoin d’entendre que les exigences de l’Évangile dans le domaine de la vie pratique sont associées à la joie.
Un slogan dit qu’un chrétien triste est un triste chrétien. L’Évangile ne nous appelle pas à être des témoins renfrognés et bougons, mais à témoigner par notre vie, nos paroles et nos attitudes de la joie de l’Évangile.
Le premier verset des Psaumes dit : « Heureux l’homme… qui trouve son plaisir dans la loi du Seigneur, et qui redit sa loi jour et nuit ! Il est comme un arbre planté près des canaux d’irrigation, qui donne son fruit en son temps, et dont le feuillage ne se flétrit pas : tout ce qu’il fait lui réussit » (Ps 1.1-3). Que nous sachions cultiver ce bonheur-là !
Le livre de Sophonie du dimanche 15 décembre
Sophonie 3.14-18 – Relèvement de Jérusalem
Le contexte – Le livre de Sophonie
Sophonie a prophétisé sous le règne de Josias qui a régné entre 641 et 610 avant notre ère. Il annonce le jugement de Dieu sur Juda et Jérusalem, mais le propre de sa prophétie est de s’inscrire dans le temps long. Sophonie parle de la chute de Jérusalem et des peuples qui l’entourent, mais la fin du livre parle dans le passage de cette semaine du retour de l’exil du reste d’Israël et du rassemblement de tous les peuples à Jérusalem dans une perspective messianique.
Le propre d’une prophétie n’est pas d’annoncer un destin implacable, mais de lancer un avertissement pour appeler au changement de comportement. La prophétie est donnée pour conduire au changement de comportement afin qu’elle ne se réalise pas, ce qui a fait dire au rabbin Jonathan Sacks : « Un oracle qui se réalise est un succès, une prophétie qui se réalise est un échec. »
Le message du livre de Sophonie est de dire : « Si vous ne changez pas de comportement, vous allez à la catastrophe », et la fin ajoute : « Si la catastrophe arrive, elle n’est pas la fin de l’histoire, mais sera suivie d’un relèvement. »
Que dit le texte ? – Annonce messianique
Dans la lignée des livres prophétiques, le livre de Sophonie a commencé avec le jugement de Dieu sur son peuple et il se termine dans la grande espérance de la restauration de Jérusalem. Tous les enfants de Jacob qui ont été exilés seront rassemblés ils vivront en sécurité pour former un peuple de louange.
En lisant ces textes, nous pouvons considérer que nous sommes appelés à poser des signes de ces temps messianiques. Ce texte est un appel :
- À la joie (Pousse des cris de joie !)
- Au courage (N’aie pas peur, ne perd pas courage)
- À la consolation (Je recueillerai ceux qui sont dans le chagrin)
Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – L’accomplissement
Nous recevons l’Évangile comme l’accomplissement des promesses du Premier Testament. Le rapprochement du livre de Sophonie et de la prédication du Baptiseur est une incitation à entendre dans la venue de Jésus la réalisation de la prophétie qui appelait à la joie, au courage et à la consolation.
À l’écoute de la prédication du Baptiseur, nous entendons que l’annonce du Royaume est une exigence qui nous appelle à vivre ce que nous espérons, à poser des signes qui témoigne de l’Évangile du Christ. Jean a une parole pour les collecteurs des taxes et les soldats, c’est à chacun à partir de sa situation de vie de discerner les actes qu’il peut poser en témoignage de l’Évangile.
La foi n’est pas un oreiller de paresse, c’est un engagement à vivre ce que nous espérons.
Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Intervenants : Laurence Belling, Antoine Nouis