Prédication de James Woody au temple de la rue de Maguelone (Montpellier) dimanche 24 septembre 2023
Chers frères et sœurs, voici encore une histoire dont on se demande bien ce qu’elle vient faire dans la Bible. Nous sommes en contexte de famine – ce qui est malheureusement encore parfois d’actualité dans notre monde ou proche de nous, parmi les personnes sans emploi qui épargne le peu d’argent qu’ils ont en rognant sur l’alimentation, ce qui est parfois le cas des étudiants. Le prophète Élisée propose de faire une soupe qui est manifestement un poison mortel qu’il va neutraliser en ajoutant de la farine.
Cela ressemble à de la magie et nous pourrions penser que la Bible nous dit qu’il est possible de transformer les aliments toxiques en nourriture consommable, quand on est prophète, quand on est dans l’intimité de Dieu. En extrapolant, nous pourrions penser que ce texte nous dit que les croyants ont, grâce à Dieu, le pouvoir surnaturel de faire le miracle qui consisterait à transformer les poisons en un potage comestible.
En fait, les textes bibliques ne s’intéressent pas tant aux choses qu’aux personnes. Dans les textes bibliques où il y a des personnages et des objets, ou des aliments, c’est plutôt vers les personnes qu’il faut regarder. C’est du côté des personnages que nous pourrons observer comment la grâce de Dieu fraie son chemin. La Bible ne néglige pas les choses, mais les rédacteurs bibliques cherchaient principalement à nous transmettre des enseignements sur l’humanité.
Dans le cas présent, les personnages sont des prophètes ; des personnes qui proclament la parole de Dieu à leurs contemporains. Très précisément, il y a le prophète Élisée, et des fils de prophètes qui sont assis devant lui. En hébreu, l’expression « fils de… » est une manière de parler d’une personne qui appartient à une catégorie. Par exemple, pour dire un humain, on dit « fils d’Adam ». Fils de prophètes peut être une manière de dire « prophètes ». Toutefois, l’indication que les fils de prophètes étaient assis devant le prophète Élisée est destinée à nous faire comprendre que ce sont des disciples qui sont à l’écoute du maître. D’ailleurs le targum, qui est la traduction en araméen, la langue que parlait le peuple hébreu déjà avant Jésus, le targum traduit cette expression par « disciples des prophètes »[1]. Ce texte met donc en scène un maître et ses disciples.
Ce texte, dans un contexte de famine, c’est-à-dire dans une situation où les gens n’ont pas assez à manger, ce qui peut exister sur le plan alimentaire, mais aussi sur le plan intellectuel et spirituel, nous présente la relation maître-disciple, ou pasteur-stagiaire, dans le but de répondre à cette situation problématique. Comment se nourrir en situation de famine. Quand c’est le désert spirituel ou intellectuel, comment réagir ?
Apprendre
La première étape est apprendre. En 2 R 4, les stagiaires sont assis bien sagement devant le pasteur pour apprendre. Contre l’idée que nous aurions la science infuse, que nous avons tout en nous-mêmes, que l’éducation ne consiste pas à autre chose qu’accoucher des savoirs qu’on possède déjà, les textes bibliques nous parlent de révélation. Les textes bibliques nous parlent de vérités qui sont hors de nous et qui nous rejoignent, par l’intermédiaire des enseignants, des prophètes, de ceux qui profèrent les enseignements nécessaires pour comprendre la vie, pour découvrir les choses essentielles pour avancer dans la vie, pour faire quelque chose de sa vie.
Le Christianisme est une religion de la révélation au sens où elle transmet des enseignements que les gens ignorent à la naissance et qu’on ne peut pas connaître sans de nombreuses expériences personnelles ou sans des personnes qui nous font gagner du temps en nous enseignant. La religion, la foi, nécessite d’apprendre des choses, par exemple des expressions de la volonté de Dieu, car la vie chrétienne n’est pas toujours en harmonie avec notre pente naturelle. Par exemple nous aimons être avec des gens qui nous ressemblent et des gens qui sont aimables. Jésus nous dit que la volonté de Dieu est de faire bon accueil à ce qui nous est étranger et à aimer ce qui est opposé à nous, nos ennemis notamment.
Contre la famine intellectuelle, spirituelle, il faut apprendre. C’est-à-dire se nourrir. Cela semble une évidence, mais combien de gens se laissent végéter, mourir, en pensant qu’ils ont tout ce qu’il leur faut – alors que nous avons besoin de notre pain non-matériel, celui dont parle la prière Notre Père, et cela chaque jour. Première étape de la vie : apprendre […]