Pour contrebalancer la frénésie de notre époque, la méditation prône la lenteur, le silence, la douceur, le bien-être, le recentrage sur soi, la bienveillance, la contemplation et l’émerveillement. Des promesses qui séduisent aussi bien dans les entreprises que dans les hôpitaux, dans les écoles comme dans les églises. Si elle semble être une découverte aujourd’hui, la méditation n’est en rien une activité nouvelle. Au sens strict, méditer signifie soumettre quelque chose à une longue et profonde réflexion. La méditation peut donc désigner une pratique qui aide à se concentrer sur quelque chose de précis : un objet, un paysage, un mot, un texte ou uniquement soi-même.

Toutes les religions et spiritualités ont leurs propres pratiques méditatives, les plus répandues étant celles inspirées du bouddhisme, les plus connues dans le christianisme étant celles des mystiques catholiques et orthodoxes. Dans le protestantisme, il y a encore beaucoup de méfiance vis-à-vis des pratiques méditatives qui seraient trop mystiques.

Dans un petit ouvrage publié il y a une quinzaine d’années, le pasteur et théologien Michel Cornuz parle plutôt du retour d’une mystique chrétienne dans le protestantisme moderne que de la méditation au sens où nos contemporains l’entendent actuellement. Or, la critique que de nombreux protestants ont fait de la mystique peut s’appliquer à la méditation: « Certains (…) refusent, au nom de la Parole et de l’Écriture, toute forme de mystique, jugée par trop individualiste, subjective, émotionnelle, quand ce n’est pas franchement païenne. »

Évolution des pratiques

Le paysage spirituel change, les attentes évoluent en matière de pratique religieuse et le protestantisme s’adapte ici et là. Ainsi Claire-Lise Altschuh, professeure de yoga et de méditation, propose au Temple-Neuf à Strasbourg un atelier Psaumes et yoga depuis quelques semaines. Avec la pratique du yoga, elle s’est rendu compte que « le fait de retourner au corps, de créer de l’espace en lui avec beaucoup de bienveillance, permet de créer de l’espace dans l’esprit, invite à la méditation. En exécutant des postures sur le tempo du souffle, quelque chose se synchronise en soi et provoque un état de conscience légèrement modifié qui invite à l’introspection et à accueillir différemment des Écritures Saintes ».

De son côté, Brigitte Grosshans anime depuis quatre ans un groupe de méditation silencieuse dans la paroisse protestante du quartier strasbourgeois de la Robertsau. Ce groupe existe depuis 18 ans et réunit des protestants, des catholiques et des orthodoxes. Brigitte Grosshans explique : « Nous nous relions à une spiritualité chrétienne et nous nous aidons des outils de la méditation pleine conscience. Nous retirons au fur et à mesure de notre pratique un peu plus de calme intérieur et la capacité de vivre l’instant présent sans recherche de performance. Nous prenons conscience de notre ancrage sur la terre, mais aussi de la difficulté de faire silence dans notre intériorité. »

L’un des fondements du protestantisme, c’est de se laisser sans cesse interpeller et de s’efforcer d’adapter la langue théologique pour la rendre audible par l’époque. Ce n’est pas renoncer à ce qui le constitue que d’expérimenter et de choisir d’autres manières de prier ou de lire la Bible.