« La musique est ce qui touche à l’essentiel dans nos vies », prévient le pasteur Pierre Magne de la Croix en prélude au culte musical de ce dimanche d’hiver. Face à lui, une centaine de chanceux, masqués et installés à juste distance les uns des autres. Le pianiste Olivier Claude et la soprano Lilia Dorndorf sont venus interpréter des œuvres de Jean-Sébastien Bach, Robert Schumann et autre Franz Schubert. Pour sa prédication, Pierre Magne de la Croix a choisi le texte de Béthanie (Marc 14, versets 3 à 9), qui raconte comment une femme vida un flacon d’un précieux parfum sur la tête de Jésus peu avant son arrestation. Un écho à la beauté de l’instant. Car quand les choses sont difficiles, nous ne sommes pas obligés de ne vivre que ce qu’il y a de difficile, interprète le pasteur. Les notes de piano d’Olivier Claude et la voix haute de Lilia Dorndorf s’élèvent dans le vaste temple une quarantaine de minutes durant. L’assistance est aussi mise à contribution pour entonner deux chants de louange. À la fin du culte, elle ne retient plus ses applaudissements. Certains battent même un rappel hésitant. Le pasteur invite les deux musiciens pour un dernier morceau. L’émotion est palpable. 

Partager des affects 

« Ça fait vraiment du bien, confie Françoise Evrard à la sortie du temple. Un an sans musique, c’est dur. On a l’impression que la vie reprend. » « J’ai trouvé de la beauté et de la bonté, ajoute Élisabeth Strich. On a besoin de musique. » Pour les musiciens aussi, le culte a été une libération. Olivier Claude ne s’était plus produit en public depuis un an et demi. « C’est l’essence de notre métier de partager des affects, respire le pianiste. Ça redonne du sens à ce qu’on fait. » « Les cultes musicaux n’ont rien de nouveau ici, insiste Pierre Magne de la Croix. D’ordinaire, j’en tiens six par an. » La paroisse du Bouclier a toujours accueilli des chorales et des concerts. Alors, quand des musiciens de son réseau l’ont sollicitée, le conseil presbytéral a tout simplement multiplié ses cultes musicaux. « Nous avons le privilège du culte, alors nous rendons service, minimise le pasteur. Nous nous faisons une sorte de cadeau réciproque. » Il rappelle que tout culte protestant est musical à un degré ou à un autre, « encore plus en Alsace, avec toute sa richesse musicale ». Et c’est finalement pour lui toute la culture qui a sa place entière dans un office : « S’il n’y a pas de culture dans un culte, alors il n’y a pas de culte. »