Le 13 septembre, le Comité consultatif national d’éthique a publié son avis n°139 intitulé « Questions éthiques relatives aux situations de fin de vie : autonomie et solidarité ».
Dans ce texte, le Comité formule deux recommandations majeures : renforcer les mesures de santé publique dans le domaine des soins palliatifs et poser les bases d’« une voie pour une application éthique d’une aide active à mourir ». Le CCNE appelle par ailleurs à la mise en place d’un débat national sur la fin de vie. Il donne ainsi un appui à la promesse d’une convention citoyenne du candidat Emmanuel Macron qui devrait voir le jour dès le mois d’octobre, pour une durée de six mois.
Dans un communiqué de presse publié le 14 septembre, la Fédération protestante de France (FFP) a réagi de manière très mesurée, en soulignant dès le début du texte le « caractère prudent » de l’avis du CCNE.
Dans un deuxième temps, la FPF exprime pleinement son opinion :
« La FPF salue l’encouragement du CCNE à déployer les mesures de santé publique nécessaires au développement des soins palliatifs ainsi qu’à une meilleure connaissance et application de la loi Leonetti-Clayes. Elle prend acte des réserves exprimées par huit membres du CCNE. Elle partage la crainte qu’en l’absence de réelle évaluation des effets de la loi Leonetti-Clayes et face à l’insuffisance des moyens actuellement alloués au développement des soins palliatifs, l’évolution législative proposée soit principalement motivée par des raisons économiques ou idéologiques.
La FPF mesure la complexité du sujet et soutient la perspective d’une convention citoyenne et d’un grand débat national. En concertation avec les autorités religieuses membres de la Conférence des Responsables des Cultes en France, elle participera de manière active à ces discussions.
Par ailleurs, la FPF s’engage à poursuivre ses réflexions sur la prise en charge de la fin de vie et à reprendre les points de vue exprimés dans l’ouvrage de sa Commission Éthique et Société « Éthique & protestantisme, éléments de réflexions » paru en 2021 pour les enrichir grâce aux éclairages proposés dans l’Avis 139 concernant « les personnes majeures atteintes de maladies graves et incurables, provoquant des souffrances physiques ou psychiques réfractaires, dont le pronostic vital est engagé à moyen terme ».
Eu égard à la diversité de ses membres en débat, la FPF tient à rappeler les quatre principes structurants qui guident sa réflexion éthique à propos de la fin de vie :
Dieu est à l’origine de toute vie. Pour les chrétiens, la dignité est intrinsèque à toute personne parce que créée à l’image de Dieu ; elle ne s’acquiert, ni ne se perd.
La vie est un don, une grâce. Elle s’inscrit dans une interdépendance, où chacun est, à la fois et successivement, aidé et aidant.
La finitude est un élément structurant de la condition humaine.
Le principe de la compassion fraternelle avec les plus vulnérables. »
Dans les premières lignes de sa déclaration publiée le 14 septembre, Mgr Pierre d’Ornellas, archevêque de Rennes, responsable du groupe de travail « bioéthique » au sein de la Conférence des évêques de France, rappelle que l’avis du CCNE « exprime avec finesse et justesse ces soins « essentiels » à la médecine ».
Puis, Mgr Pierre d’Ornellas soulève :
« Vouloir développer « en même temps » les soins palliatifs et l’aide active à mourir, c’est à la fois favoriser l’expression des désirs individuels d’une mort immédiate, et promouvoir le soin par l’écoute et l’accompagnement de la vie, aussi fragile soit-elle. En définitive, c’est décider de faire peser sur tous le choix cornélien de mourir ou de vivre ! Dans leur écrasante majorité, les médecins des soins palliatifs dénoncent la contradiction entre le soulagement qu’ils savent offrir et la proposition de donner la mort, proposition que les patients seront obligés d’envisager.
L’Avis du CCNE jette du brouillard sur la réflexion. Il utilise le même mot « fraternité » pour qualifier à la fois l’aide active à mourir et l’accompagnement par les soins palliatifs. Mais comment appeler fraternel le geste qui donne la mort à son frère qui la demanderait ? Ce n’est pas dans le brouillard qu’on discerne le projet de société à édifier ! Soit nous choisissons une société des désirs individuels qui s’imposent à tous, y compris au corps médical. Soit nous souhaitons une société de la fraternité grâce à laquelle les personnes les plus vulnérables sont collectivement entourées de considération et accompagnées par le soin.
Pourquoi l’Avis du CCNE ne pose-t-il pas dans le débat la longue tradition éthique issue du « tu ne tueras pas », qui fonde notre civilisation et qui donne de la clarté pour penser notre responsabilité collective face à la question si complexe de la fin de vie ? »