Depuis l’aggravation soudaine, mi-novembre, de la crise politique et sécuritaire en Haïti des groupes armés ont intensifié leurs attaques, plongeant la capitale dans le chaos. Dans un communiqué publié le 25 novembre, l’Organisation internationale pour les migrations a recensé plus de 40 000 personnes chassées de leur domicile dans les dix jours qui ont suivi le limogeage du Premier ministre, Garry Conille et son remplacement par Alix Didier Fils-Aimé, le 11 novembre. En raison de ces exactions, aucune maternité n’a ouvert durant de nombreux mois, a déploré Pascale Solages, cofondatrice et coordinatrice générale de l’association féministe Nègès Mawon, citée par Le Monde. Une maternité a rouvert le 2 décembre après neuf mois de fermeture. Les Haïtiennes ont des difficultés pour accéder aux soins. Ainsi, fin novembre, quatre femmes enceintes sont mortes dans la région de Port-au-Prince, contrôlée à 80% par des bandes criminelles. Les gynécologues et les anesthésistes contactés n’ont pas pu intervenir à temps en raison des routes bloquées.
Les violences sexuelles ont aussi explosé à cause des gangs armés. Ils « considèrent le nombre de viols comme un indicateur de leurs victoires quand ils attaquent un quartier. Ils s’en vantent sur les réseaux sociaux », a expliqué Pascale Solages. Dans une enquête publiée le 25 novembre, Human Rights Watch a souligné l’escalade des violences sexuelles en Haïti. Ainsi, les groupes criminels « ont notamment soumis des filles et des femmes à d’horribles abus sexuels ». La violence sexuelle est utilisée pour faire peur. « Entre janvier et octobre, près de 4 000 filles et femmes ont signalé des violences sexuelles, notamment des viols collectifs, commis pour la plupart par des membres de groupes criminels », a indiqué l’ONG. « De nombreuses survivantes souffrent des conséquences des abus physiques et des mauvais traitements ou se retrouvent enceintes, sans avoir accès à des services médicaux, psychosociaux ou juridiques », a ajouté Human Rights Watch.
Le nombre de survivantes de viols a explosé en Haïti
Les femmes sont aussi vulnérables aux violences sexuelles lorsqu’elles se trouvent dans des camps de déplacés. Elles sont davantage exposées au VIH ou aux autres infections sexuellement transmissibles. L’organisation Solidarité Femmes Haïtiennes a ainsi accueilli 560 survivantes de viols entre janvier et août 2024, contre 159 durant toute l’année 2023. Les femmes sont les premières victimes de la violence en Haïti, alors que le pays est déchiré. Un massacre a eu lieu, durant le week-end du 7 et 8 décembre, dans le quartier de Cité Soleil, le plus grand bidonville d’Haïti. Ce nouveau massacre aurait coûté la vie à 180 personnes, en majorité des personnes âgées, relate RFI. Après la mort de son fils, Monel Felix, chef autoproclamé de l’un de ces groupes armés, a attribué le décès de son enfant à la sorcellerie. Il a accusé les personnes âgées et les pratiquants du culte vaudou d’être responsables de la mort de son fils, menant à un massacre. Le bilan de 180 morts pourrait encore s’alourdir puisque 80 personnes seraient encore détenues par le gang. Le gouvernement haïtien a dénoncé un « massacre abject » et a condamné « un acte de barbarie, d’une cruauté insoutenable ». De son côté, le Haut-commissaire de l’ONU aux droits de l’homme, Volker Türk, a fait état de 5000 morts en Haïti en 2024.