Jour après jour nous sommes terrifiés par le délitement des libertés et droits fondamentaux. En France, au fronton de nos mairies nous lisons Liberté, Égalité, Fraternité. Or nous nous soucions bien peu de la fraternité alors qu’elle est aussi au cœur de l’article 1er de la Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH), adoptée dans un rare consensus le 10 décembre 1948 au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Elle est aujourd’hui bafouée plus qu’elle ne l’a jamais été par des autocrates mais pas seulement, car la « trumpisation » des esprits poursuit son chemin dévastateur sans frontières.
L’article 1er de la DUDH est ainsi rédigé : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits, ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité ». En d’autres termes, être toutes et tous égaux en dignité avant même de l’être en droits doit induire la fraternité. Prenons l’exemple de la lutte contre le racisme et l’antisémitisme fondée sans aucun doute sur l’égale dignité des personnes humaines et la fraternité.
Voilà une parabole rabbinique explicitant mieux qu’un discours théorique le lien indissoluble entre l’égale dignité et la fraternité : « Un rabbin demandait un jour à ses élèves à quoi l’on peut reconnaître le moment où la nuit s’achève et où le jour commence. Est-ce quand on peut distinguer de loin un chien d’un mouton ?, dit l’un d’entre eux. Non, dit le rabbin. Est-ce quand on peut distinguer un dattier d’un figuier ? Non, dit encore le rabbin. Mais alors, quand est-ce ?, demandèrent les élèves. C’est lorsqu’en regardant le visage de n’importe quel homme tu reconnais ton frère ou ta sœur. Jusque-là il fait encore nuit ».
N’est-ce pas cela aussi le message de Pâques ?
Christine Lazerges, professeure de droit pénal, pour « L’œil de Réforme »