On n’a jamais tant parlé en France de la zone Indo-Pacifique que depuis la rupture le 15 septembre 2021 du contrat qui visait à fournir douze sous-marins à l’Australie. Pour rappel, Canberra a préféré aux sous-marins commandés à la France des technologies américaines et britanniques, dans le cadre d’une alliance de sécurité entre les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Australie dans la zone Indo-Pacifique. Ce qui a engendré une profonde crise diplomatique.
La rupture du « contrat du siècle » a rappelé combien cette région est devenue une zone stratégique majeure. Il s’agit, en effet, aujourd’hui d’un carrefour stratégique mondial. Comptant sept membres du G20 (Afrique du Sud, Australie, Chine, Corée du Sud, Inde, Indonésie, Japon), cette zone Indo-Pacifique est devenue le moteur de la croissance mondiale et représente aujourd’hui 60% du PIB mondial.
« L’Indo-Pacifique est un concept politique et stratégique avant d’être géographique. Il a d’abord été employé en 2007 par un ancien marin indien devenu directeur de la National Maritime Foundation à New Delhi, avant d’être repris par l’ex-Premier ministre japonais Shinzo Abe puis par les dirigeants des États-Unis, de l’Australie… (…) La géographie est paradoxalement secondaire dans l’adhésion au concept d’Indopacifique, dans la mesure où ses promoteurs ne partagent pas la même représentation territoriale de la zone – la France en a par exemple une vision très large, qui englobe ses territoires d’Outre-mer de l’île de la Réunion à la Polynésie, tandis que la vision australienne va de l’Inde aux États-Unis », rappelle Delphine Allès, professeure des universités en science politique à l’Institut national des langues et civilisations orientales (Inalco) au magazine Sciences et avenir.
Stratégie française
Depuis le quinquennat Hollande, notre pays a choisi d’y placer ses pions. Rappelons que « la France y est présente avec ses départements ou régions français d’outre-mer et communautés d’outre-mer (…) Par ailleurs, on compte dans les pays de la zone environ 150 000 Français résidents, plus de 7000 filiales d’entreprises implantées et 8 300 militaires en mission au sein de forces pré-positionnées », selon France Diplomatie. La France a été le premier État d’Europe à publier une stratégie Indo-Pacifique. Elle souhaite y intensifier sa politique d’exportations stratégiques et la signature de partenariats stratégiques avec de nombreux États (Inde, Japon, Australie, Indonésie, Vietnam…).
Dans cette zone, les États-Unis et l’Australie sont des alliés contre la Chine : ils ne supportent plus que Pékin veuille régner en maître sur toute cette zone. Cela explique notamment la récente commande de sous-marins américains par l’Australie.
«Il faut proposer une stratégie de compétition et de concurrence assumée dans l’IndoPacifique pour qu’un modèle alternatif puisse être trouvé. Pour l’instant, l’Europe est exclue de cette initiative», a martelé Jean-Yves Le Drian, ministre des Affaires étrangères, le 20 septembre à l’ONU.