La coopération comme rempart à la toute-puissance dans l’Église : prévenir en favorisant une culture du conflit constructif (2/3)
Marie-Christine Carayol nous propose une série de trois articles sur le lien entre coopération et toute-puissance. Dans le premier article de la série, l’autrice proposait un état des lieux de la toute-puissance dans l’Église. Voici le deuxième volet.
« La présence de personnes en toute-puissance dit quelque chose à l’Église sur ses fonctionnements et ses dysfonctionnements, sur ses manières d’être au plan spirituel et ecclésial. L’exercice de la toute-puissance dans une communauté n’est pas seulement une affaire de relations défectueuses entre ces personnes ; la toute-puissance s’installe et croît dans un contexte qui l’a rendu possible. »
Revenons à la place de l’illusion dans ces jeux destructeurs. Bonhœffer nous sensibilise longuement au fait que « toute image humaine illusoire, qui se trouve introduite dans la communauté chrétienne, empêche la communauté authentique et doit être brisée pour que la communauté chrétienne puisse vivre ».
Celui qui préfère son rêve d’une communauté humaine à la communauté chrétienne elle-même, celui-là devient le destructeur de toute communauté chrétienne, quels que soient l’honnêteté, le sérieux et le dévouement qu’il exprime personnellement dans ses intentions.
Les fantasmes et désirs de toute-puissance ne sont pas simplement issus de personnes mauvaises ou méchantes. Ce sont ces rêves encore bien actifs d’Église idéale qui les envahissent avec une telle force, que l’autre ne devient plus qu’un objet au service de leurs rêves et projections. Les victimes se retrouvent ainsi utilisées, manipulées, contrôlées, rejetées, exclues, ignorées, ou encore humiliées. Et malgré cela, si le rêve ne devient toujours pas réalité, ils développent une véritable frustration qui peut aussi mener à de l’agression.
« La théorie de la frustration-agression a été mise au point dans les années 1930 par John Dollard, Neal E. Miller et d’autres behavioristes. D’après cette théorie, l’agression naît de la frustration et toute frustration mène à l’agression : il y a donc une relation de causalité entre les deux. Lorsque des individus ou un groupe d’individus s’aperçoivent qu’on les empêche d’atteindre leur but, il y a de fortes chances que […]