Alors que les députés devaient reprendre ce lundi 10 juin l’examen du projet de loi sur l’aide à mourir, la décision du président Macron de convoquer les Français aux urnes les 30 juin et 7 juillet, après les élections européennes, remet à zéro le processus législatif sur la fin de vie, sans pour autant l’abandonner définitivement selon les informations de franceinfo. Dans sa version actuelle, le projet de loi examiné en première lecture réservait l’aide à mourir aux personnes de plus de 18 ans, françaises ou résidant en France. 

Ces personnes devaient souffrir d’une « affection grave et incurable, engageant le pronostic vital, en phase avancée ou terminale », entraînant une souffrance physique ou psychologique réfractaire ou insupportable. Les candidats à cette aide devaient également être capables d’exprimer leur volonté de manière libre et éclairée. Les députés avaient exclu la possibilité d’inscrire le recours à l’aide à mourir dans les directives anticipées et avaient supprimé la possibilité pour un tiers d’administrer la substance létale. Si le dossier est rouvert, les nouveaux députés devront néanmoins réexaminer l’intégralité du texte en commission puis dans l’hémicycle, la dissolution annulant le travail déjà accompli

Une décision contestée 

Parmi les partisans du texte, la déception est palpable. « L’arrêt soudain de ce qui devait être la grande loi sociétale de cette décennie est une énorme déception », reconnaît Olivier Falorni, le rapporteur général du projet de loi. « Je crains fortement que l’examen soit interrompu pour longtemps », déclare le député sortant MoDem, alors que le Rassemblement national, majoritairement opposé au projet, est favori des législatives anticipées. Si l’extrême droite gagne, « ce sera très clairement la fin de la loi sur la fin de vie ». Si la majorité conserve l’Assemblée, le texte restera-t-il une priorité parlementaire ? « Très sincèrement, l’enjeu des trois prochaines semaines, c’est de tenir bon. Ensuite, l’avenir de la loi dépendra du résultat des élections », indique le rapporteur, alors que la Charente-Maritime, où il est élu, a largement soutenu la liste menée par Jordan Bardella. 

Du côté des opposants au texte, la « satisfaction » prévaut. « Je n’imagine pas qu’il soit reprogrammé immédiatement », avance Patrick Hetzel, député sortant des Républicains, qui, comme la majorité de sa famille politique, s’oppose à l’aide à mourir. « Et avec les navettes parlementaires nécessaires sur un texte comme celui-ci, même s’il finit par obtenir une majorité, ce ne sera pas avant 2026 ou plus tard. » Claire Fourcade, vice-présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs et opposante de longue date à l’euthanasie, partage ce sentiment de soulagement. « Ce texte allait dans une direction qui ne nous semblait pas appropriée », estime-t-elle, et elle prévoit d’utiliser le temps gagné par les législatives pour continuer « à informer tous ceux qui veulent en savoir plus sur notre opposition à l’aide à mourir. » Cependant, pour d’autres opposants, le délai supplémentaire n’est pas synonyme de victoire. « La boîte de Pandore est ouverte, il faut aller jusqu’au bout de la discussion maintenant », estime François Braun, ancien ministre de la Santé, qui avait exprimé ses réserves sur l’aide à mourir lorsqu’il était encore au gouvernement. « Reporter encore la discussion reviendrait à rouvrir une nouvelle fois ces débats. »