Si vous lisez régulièrement ce blog, vous savez que je suis formatrice sur les premiers secours en santé mentale. Cette compétence de secouriste m’aide fréquemment à soutenir des personnes de mon entourage angoissées ou qui traversent des phases dépressives – entre autres – en les orientant vers les professionnels compétents qui peuvent les prendre en charge. Cette année, une de mes amies a eu la douleur de perdre son fils brutalement dans un accident de moto. Avec un petit groupe d’amies, nous avons fait tout notre possible pour la soutenir, mais je reconnais m’être sentie souvent démunie et impuissante devant cette peine indicible. C’est dans cette période que ma pasteure m’a parlé de la sensibilisation aux « Derniers secours » qu’elle avait suivie. Après m’être renseignée, me voilà inscrite – et en route pour Dunkerque pour suivre ce module !
La mort fait partie de la vie
Si jadis la plupart des Français décédaient à leur domicile, souvent entourés de leurs proches, aujourd’hui près de 60% de nos concitoyens meurent à l’hôpital. La mort a disparu de notre quotidien, elle est cachée, gommée car jugée terrible – à moins qu’on ne voit en elle une insulte à la vie. Les bénévoles de Derniers secours le clament pourtant : la mort fait partie de la vie.
Les personnes hospitalisées en soins palliatifs sont fort heureusement visitées par leurs proches, ou des bénévoles associatifs quand la famille n’est plus là. Leurs derniers instants peuvent donc être entourés de douceur, même dans ce cadre impersonnel.
Pour celles qui retournent à leur domicile pour leurs derniers jours, ce sont les membres de leur famille qui vont prendre soin d’elles. Mais comment se comporter, et que dire face à la détresse ou à la peur ? Comment « vivre sa vie » jusqu’au bout ?
Se former à l’accompagnement de fin de vie
Derniers secours se présente comme une formation à l’accompagnement de fin de vie. Elle a été initialement créée en Allemagne par le Dr Bollig, médecin urgentiste et en soins palliatifs. En France, le programme est développé par la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs. La sensibilisation dure 3 heures, est gratuite et ouverte à tous publics. Ce n’est cependant pas un groupe de parole, même si autour de la table où une dizaine de personnes se sont réunies, la plupart ont perdu un proche (enfant, conjoint, parent) parfois brutalement. D’autres ont en charge une personne ayant une maladie dégénérative. Pourtant, l’ambiance est plutôt à la bonne humeur et surtout au respect. Nos deux animatrices y sont assurément pour quelque chose : Corinne est infirmière en soin palliatifs depuis 17 ans, passionnée par son métier, et Dominique bénévole de l’association « Aujourd’hui la vie », qui offre une présence et une écoute aux personnes âgées hospitalisées et aux grands malades.
Comprendre pour en parler et mieux choisir
La sensibilisation est découpée en quatre modules : parler de la mort, anticiper et se préparer, soulager les souffrance et l’adieu.
Des informations importantes sont échangées, trop peu connues encore, comme la possibilité de rédiger des directives anticipées pour écrire noir sur blanc ses souhaits en cas de poursuite, d’arrêt ou de refus de traitements médicaux à la fin de sa vie, ou encore la désignation d’une personne de confiance qui sera chargée de transmettre ces directives à l’équipe médicale si l’on n’est plus en capacité de s’exprimer.
On apprend au passage ce qui peut soulager une personne qui souffre physiquement ou psychiquement, avec les moyens qui peuvent être les nôtres – notamment les soins de bouche, dont je n’avais personnellement jamais entendu parler, mais qui peuvent faire une grande différence en termes de confort. Des mots précis sont mis sur les termes de sédation profonde (qui n’a rien à voir avec l’euthanasie) ou d’arrêt de l’hydratation et de la nourriture – une perspective que je considérais jusque là comme inhumaine. Les informations sur les rituels d’adieu, le processus du deuil et la réaction des proches m’ont énormément intéressée.
Qu’est-ce que j’en ai retiré ? Essentiellement, un sentiment d’apaisement sur ce sujet, qui a été évoqué avec tact, pudeur mais réalisme par nos formatrices. La formation est laïque, mais respecte les croyances de chacun et les convictions sur la fin de vie. Je me suis sentie plus forte pour en parler. J’ai acquis la certitude de devoir préparer pour moi un certain nombre de choses, pour que ma volonté soit respectée, mais aussi pour soulager mes enfants de décisions sensibles. Il n’y a pas d’âge pour y penser. Et j’ai beaucoup appris sur la mort, et la vie, en notant cette phrase : « Ce sont les mourants qui ouvrent les yeux des vivants. »
La formation est accessible dans toute la France, et il y a même des modules en visioconférence. Ne détournons pas notre regard de cette étape ultime de l’existence.
Pour en savoir plus :
– Les dates des formations sont sur le site : www.derniers-secours.fr
– Un site pour parler de ces sujets aux enfants et aux adolescents : lavielamortonenparle.fr
– « 100 réponses aux questions sur le deuil et le chagrin », Nadine Beauthéac, Le Livre de Poche
– « Mémoires de vie, mémoires d’éternité » et « Sur le chagrin et le deuil », d’Elisabeth Kübler-Ross, Ed. Pocket
– « Vivre le deuil au jour le jour », Dr Christophe Fauré, Albin Michel
– « A l’écoute des proches aidants, approche psychique des émotions des accompagnants et des soignants », Hélène Viennet, Ed. Seli Arslan
– Soins palliatifs, cahier de l’aidant, de la famille et des amis, une brochure réalisée par la maison médicale Jeanne Garnier, à télécharger
