Charlie Hebdo lance l’alerte contre le délit de blasphème avec un numéro spécial mercredi 6 septembre. Le gouvernement danois a en effet présenté au Parlement, vendredi 1er septembre, un projet de loi pour interdire la dégradation publique d’objets religieux.
L’hebdomadaire satirique cherche à « alerter les citoyens attachés aux valeurs démocratiques », aux côtés de huit médias scandinaves. Sept journaux ou sites en ligne norvégiens ainsi qu’un hebdomadaire danois critiquent la position du Danemark, apprend Le Monde.
Des autodafés embarrassants pour les gouvernements
En Europe septentrionale, de nombreuses polémiques ont éclaté depuis que des gouvernements prennent leur précaution avec les symboles religieux. En Suède, des scènes de violence se sont produites après l’autodafé d’un exemplaire du Coran, dimanche 3 septembre. Le réfugié irakien Salwan Momika avait organisé un rassemblement pour brûler un Coran, sur une place où vit une importante population immigrée. L’homme d’origine chrétienne disait alors vouloir dénoncer la violence du Coran et « préserver la liberté d’expression ».
Embarrassé, le Premier ministre suédois a montré publiquement sa réprobation à l’égard de ces autodafés. En janvier 2023, une manifestation avait déjà donné lieu à un autodafé, et le chef du gouvernement avait dénoncé un « acte profondément irrespectueux », rapporte 20minutes. « La liberté d’expression est une part fondamentale de la démocratie. Mais ce qui est légal n’est pas nécessairement approprié », avait également déclaré le dirigeant conservateur Ulf Kristersson sur Twitter.
Ces rassemblements subversifs ont gagné le Danemark, où deux autodafés du Coran ont eu lieu devant l’ambassade d’Irak, les 21 et 24 juillet. Le ministère des Affaires étrangères danois a dénoncé un « acte honteux » et « provocateur, qui blesse de nombreuses personnes ». Mais cette réaction n’a pas empêché le gouvernement irakien de condamner « fermement » les autodafés. Un millier d’Irakiens ont alors tenté de marcher sur l’ambassade danoise, avant d’être dispersés par la police.
Une loi inquiétante ?
Après avoir aboli le délit de blasphème il y a six ans, le Danemark pourrait aujourd’hui revenir sur sa décision pour apaiser la crise. Vendredi 25 août, le gouvernement a présenté à la presse un projet de loi visant à « interdire le traitement inapproprié d’objets ayant une signification religieuse importante pour une communauté religieuse ».
Le texte vise le fait de brûler ou piétiner le Coran dans un lieu public, mais aussi dans un lieu privé si l’action est diffusée sur les réseaux sociaux. La disposition s’appliquera donc aux profanations de la Bible, de la Torah ou encore des crucifix. Mais le projet de loi ne couvre pas « l’expression verbale ou écrite » de ces gestes, comme les caricatures.
Pour la rédaction de Charlie Hebdo, journal laïc dont une partie de l’équipe a été assassinée dans un attentat islamiste, cette loi est inquiétante. « C’est grave qu’un pays européen décide de rétablir ce délit moyenâgeux », prévient le directeur de la publication, Riss, cité par Le Monde. La rédaction estime ainsi que le gouvernement danois plie sous la pression des pays musulmans au régime dictatorial, comme l’Iran ou l’Arabie saoudite.