Le péril écologique qui menace notre planète est grand, il n’a même jamais été aussi près d’engloutir l’humanité. Il est donc plus que souhaitable que les Églises prennent position en faveur d’une action globale et que, surtout, elles appliquent là où elles le peuvent les règles nécessaires à une prise en charge du risque écologique. Mais cela revient-il à prétendre qu’elles ont à proposer un discours spécifique au sujet de la question écologique ? Je ne le crois pas et je serais même tenté de dire que leur rôle est, au contraire, de rester vigilantes à ce sujet.
L’avènement de la morale écologique
Ne nous faisons pas d’illusion : la morale écologique est devenue aujourd’hui la pensée dominante – ce qui ne veut pas dire, bien entendu, que tout le monde fasse ce qu’il faut. Il n’est besoin, pour s’en persuader, que de considérer comment les entreprises ont désormais intégré dans leur discours marketing l’aspect écologique et en font même un argument récurrent. Or ceci ne va pas sans poser une question : est-ce la vocation des Églises que de prêcher la morale commune, dominante ? Une première chose qui doit être soulignée, c’est que lors des premiers développements en faveur de l’écologie dite politique (celle qui se soucie de porter au plan politique, celui de la « cité », la question écologique), la critique envers le christianisme a été l’un des éléments clefs du débat : en insistant sur le salut, sur le destinataire du message de l’Évangile (l’être humain), les Églises, et en particulier les Églises protestantes, auraient contribué à l’anthropocentrisme de la modernité et donc à l’exploitation abusive de la nature par l’homme. Que cette thèse soit historiquement fondée importe peu – ce qui est sûr, en revanche, c’est qu’avec la prise de conscience progressive de la société face au péril écologique, nombreux ont été les théologiens à vouloir montrer que, non, le christianisme n’est pas naturellement enclin à mettre de côté la dimension écologique. D’où le retour en force des théologies de la Création, le développement de la « green theology » et des discours officiels des institutions ecclésiastiques en faveur de […]