En tant que protestant, et en tant que protestant libéral, nous avons sans doute une perspective qui mérite d’être exposée.

Être libéral, c’est refuser de se contenter de répéter une vérité toute faite et de renoncer à la réflexion, c’est aussi accepter d’évoluer à partir de pensées différentes. Au nom de ce principe d’évolution et d’ouverture, nous pouvons concevoir nos identités en refusant de les enfermer dans un déterminisme total. C’est cette démarche que nous tentons ici.

Le mariage n’est pas une question religieuse. Si Jésus participe à Cana à des noces, c’est qu’il choisit d’être présent dans cette festivité sociale et familiale. La prise de contrôle du mariage par la religion est sans doute une évolution et une déviation de l’histoire.

En grec, il existe plusieurs mots et plusieurs verbes pour parler de l’amour. Que ce soit dans le « commandement d’amour » (tu aimeras ton Dieu et ton prochain comme toi-même) ou dans le très beau texte de 1 Corinthiens 13 (lu et relu lors des mariages…), il ne s’agit à aucun moment de l’eros mais de l’agapè. Autrement dit, l’amour qui est la conséquence de la grâce est l’amour que je dois porter à tout être humain, y compris à moi-même. Il ne s’agit pas de l’amour « érotique » de la vie de couple. Le mariage n’est donc pas de l’ordre de la grâce ou du commandement mais de l’intimité humaine qui s’organise socialement. Il faut rappeler ici que les protestants célèbrent des « bénédictions de mariage » et non des mariages. Celui-ci n’est d’ailleurs pas qualifié de sacrement, à la différence de l’Église catholique romaine pour qui le seul véritable mariage est le sacrement du mariage religieux.

Pour les protestants, l’Église accompagne l’aspect spirituel que le couple veut donner à son choix de mariage. Lorsque le couple entre dans un temple pour une telle célébration, les époux sont déjà mariés, et totalement mariés. La conséquence de cela est que si le mariage est d’abord une question civile, c’est en tant que citoyens que nous pouvons avoir une opinion. En aucun cas, une parole d’Église ne peut faire autorité sur cette question. Elle est un avis parmi d’autres, mais l’Église n’a pas de compétence spécifique dans ce domaine. Les protestants devraient ici davantage faire entendre leur voix ! Précisément pour dire que cette question du mariage pour tous les concerne en tant que citoyens d’abord et non prioritairement en tant que chrétiens et membres d’Églises. […]