Par Nicolas Cadène, rapporteur général de l’Observatoire de la laïcité auprès du Premier ministre.
L’histoire de France a montré combien notre laïcité avait finalement permis l’apaisement dans un pays qui a particulièrement souffert des guerres de religions. Mais la laïcité ne peut permettre le vivre ensemble que si elle est bien comprise et appréhendée. Dans le cas contraire, loin de rassembler, sa mauvaise interprétation ou sa mauvaise application peut conduire à la division, ou pire à l’exclusion.
Rappelons-le, la laïcité repose sur plusieurs principes : la liberté de conscience, la séparation des pouvoirs politique et religieux, et l’égalité de tous devant la loi quelle que soit leur croyance ou leur conviction. Elle garantit à tous la liberté de croire ou de ne pas croire et la possibilité de l’exprimer, dans les limites de l’ordre public. Elle suppose également la séparation de l’État et des organisations religieuses, de laquelle se déduit la neutralité de l’État, des collectivités et des services publics, non de ses usagers. La République laïque assure ainsi l’égalité des citoyens face au service public, quelles que soient leurs convictions ou croyances.
La France est profondément attachée à ses principes républicains. Mais, en période de crise, il y a des replis sur soi et sur des valeurs traditionnelles, des pratiques religieuses parfois réinventées, et des pressions communautaristes voire des provocations contre la République – souvent plus médiatisées qu’auparavant –, en particulier dans des quartiers trop longtemps laissés à l’écart, où le sentiment de relégation sociale est très fort.
En parallèle, il y a une forte crispation autour de la visibilité religieuse et de toute expression religieuse, essentiellement dans l’hexagone où la diversité est plus faible que dans les Territoires d’Outre-mer. Il y a donc une tension, et les conflits internationaux ainsi que la situation économique et sociale n’y sont pas étrangers. Nous touchons ici plusieurs difficultés qui, en réalité, ne sont pas directement liées à la laïcité. […]