Qui était réellement Jésus ? À chaque époque, dans chaque culture, on s’en est fait une certaine image, parfois proche mais d’autres fois bien éloignée de l’image biblique. Au sein de cette galerie de portraits, l’Église a travaillé à construire et à transmettre l’image de celui qu’elle a reconnu, depuis le commencement, comme vrai Dieu et vrai homme.

Jésus à travers le temps

Jésus, à travers le temps, règne. La victoire acquise, il l’exploite en se soumettant les puissances ; il leur arrache les hommes dont il a payé le rachat. Dans la Maison du Père, il prépare pour les siens une place, en attendant de revenir juger les vivants et les morts.

Mais la connaissance de Jésus, à travers le temps, connaît des états fort divers. Sur la terre, son nom reste un signe de contradiction. Qui est-il ? Nombreux sont ceux qui croient, et reconnaissent « Jésus Seigneur » ; mais tous n’obéissent pas à l’Évangile. Ceux qui vivent après Jésus-Christ (le calendrier le leur rappelle) se font beaucoup de « christologies » contradictoires ; certains se forgent une image de lui an rejetant le seul témoignage autorisé, le témoignage apostolique ; d’autres disent l’accepter, mais en partie, et le déforment ; ceux même qui reçoivent ce témoignage en vérité sont incapables d’en saisir toute la richesse et la complexité.

Il serait fastidieux le catalogue de toutes les erreurs, hérésies, contrefaçons, que l’histoire de la christologie doit recenser. Nous résumerons à très gros traits le devenir de la connaissance de Jésus à travers le temps, en cherchant quelles leçons en tirer. Les idées des docteurs nous intéresseront – elles sont souvent, après quelques générations, celles de tout le monde – mais aussi la façon dont le peuple des fidèles (et des infidèles) a vu Jésus, et la façon dont les artistes, ces témoins privilégiés de leur époque, l’ont représenté.

Dieu dans la chair

Les chrétiens de l’antiquité (jusqu’en 500, environ), s’efforcent de dire correctement le mystère révélé de Jésus, Dieu et homme. Les païens se moquent quand ils ne persécutent pas : on a retrouvé un graffiti blasphématoire au Mont Palatin, qui donne au Crucifié une tête d’âne. Le danger le plus grand ne vient pas de leur côté, mais de faux docteurs, les antichrists gnostiques. Les gnostiques évaporent l’humanité de Jésus en simple apparence (c’est l’hérésie docète, du mot qui signifie « sembler »), parce qu’ils sont lourdement dualistes et confondent la matière et le mal. Les gnostiques encore, puis des hommes qui se proclameront orthodoxes, abaissent la divinité de Jésus à un niveau inférieur : il est dieu, mais non pas Dieu ; le Fils est […]