Je me souviens du vif intérêt que j’avais éprouvé à la lecture de deux traités abordant la théologie de la création et la question éthique de l’écologie. Il s’agissait de Dieu dans la création, de Jürgen Moltmann (1985) et d’Être image de Dieu, de Douglas John Hall (1986). Cependant, ce qui faisait l’objet d’un sous-titre chez Moltmann (Traité écologique de la création) a désormais pris la première place et la figure de Dieu a tout simplement disparu, ainsi qu’un florilège de quelques publications récentes le prouve – que ce soit du côté protestant (Crise écologique et sauvegarde de la Création, 2017 ; Bible et écologie, 2019) comme du côté catholique (Penser l’écologie dans la tradition catholique, 2018 ; L’écologie, nouveau jardin de l’Église, 2020). Ce constat anodin recouvre néanmoins une tendance profonde, celle de l’écologisation de la théologie, au moment même où, face à une situation environnementale planétaire de plus en plus catastrophique, s’impose l’écologisation de la société dans toutes ses manifestations (littérature, science, politique, économie, spiritualité, loisirs). Une telle tendance conduit non pas à considérer l’écologie à la lumière de la théologie mais, tout au contraire, à « verdir » l’Église (The Greening of the church, 1971), la théologie (The Greening of theology, 1995), la foi (The Greening of faith, 1997), jusqu’à Dieu lui-même (God is green, 2016).
Opposer désir et nécessité ?
Je ne critique pas la prise de conscience écologique dans l’Église (l’approuvant et y ayant moi-même contribué récemment) mais constate que la théologie embrasse aujourd’hui l’écologie avec le même entrain (et donc les mêmes excès) qu’elle embrassait hier le communisme ou la révolution. À chaque fois, il s’agit de redécouvrir des vérités jusqu’alors oubliées ou minorées, dignes d’être reçues et défendues, aujourd’hui peut-être plus qu’hier, mais souvent au prix d’une lecture biblique colorée d’angélisme, de syncrétisme et de […]