Tenter d’imaginer où se loge Dieu est déjà une manière d’essayer de percer son mystère. La place de Dieu n’est-elle pas celle qu’on lui fait ?
Poser la question du logement de Dieu, c’est déjà penser Dieu comme un être qui, à l’image des simples créatures, aurait besoin de se poser quelque part pour y être chez lui. C’est penser qu’il habite un espace particulier où nous avons des chances de le rencontrer. C’est penser qu’il serait un être comme nous, tout en étant au-dessus de nous, plus puissant, plus sage et plus juste. Ainsi avons-nous du mal à nous défaire de cette idée que Dieu serait une personne et donc localisable.
« Montre-moi comment tu habites et je te dirai qui tu es », dit le proverbe. Parce que la curiosité sur le logement de Dieu est une manière d’essayer de percer le mystère de Dieu lui-même : Comment est-il ? Comment vit-il ? Avec qui ? Quelle place prend-il ? D’où dirige-t-il le monde ? De quels moyens d’action dispose-t-il ? Que voit-il de nous ?
Dieu habite le ciel
Pour les Hébreux de l’Ancien Testament, mais aussi pour les évangiles, Dieu habite le ciel. Comme le dit la fameuse prière : « Notre Père qui es aux cieux ». Parce que c’est du ciel que viennent la lumière et la chaleur ; mais aussi parce que le ciel est ce mystère que nous ne pouvons pas comprendre, qui nous dépasse et nous domine complètement. Surtout pour les anciens, il est impénétrable et inexplicable. Loin de nous par son immensité, mais proche de nous parce qu’il descend jusque sur la terre, la modèle et l’englobe. C’est bien ce que nous dit la Bible, par exemple Ésaïe 66 qui proclame que le ciel est le trône de Dieu, mais que du ciel, Dieu regarde l’humilié qui a l’esprit abattu. Pas étonnant que Dieu en ait fait sa demeure. Il se cache dans ce qui est inaccessible et inconnaissable. Et il se cache dans ce ciel qui descend jusqu’à toucher les hommes en peine.
Dieu habite le sanctuaire
Aussi le peuple d’Israël a voulu enfermer Dieu dans des lieux plus accessibles. Et les institutions religieuses ont toujours eu la tentation de le mettre dans leurs murs pour bien dire qu’il était chez elles, qu’à ce titre elles étaient divinement inspirées et qu’il fallait donc se soumettre à leur vérité. Enfermé dans les tabernacles des synagogues et des églises, Dieu n’avait plus qu’à se laisser faire et à se plier à ce qu’on attendait de lui.
Dieu habite l’homme
Heureusement Paul, qui a fait sortir le christianisme naissant de Jérusalem, a une autre vision de la demeure de Dieu en s’exclamant dans sa première lettre aux Corinthiens : « Ne savez-vous pas que vous êtes le Temple de Dieu ? » Paul inverse la compréhension de Dieu : ce n’est plus l’homme qui va dans la maison de Dieu, mais Dieu qui va dans la maison de l’homme. […]