Chaque été, le blog Inspirations vous propose une série estivale. Cette année, nous allons nous pencher sur notre roman familial, avec les différents concepts et pistes de travail qu’offre la psychogénéalogie.
Si la généalogie passionne les Français, et consiste à reconstituer la biographie des membres des générations qui nous ont précédé, la psychogénéalogie s’intéresse à des héritages plus impalpables.
Ceux-ci alimenteraient dans nos existences des blocages, croyances, phénomènes de répétition et mêmes troubles psychiques ou physiques qui proviendraient de nos ancêtres, non pas par la génétique, mais par des transmissions familiales inconscientes. Vous trouvez cela étrange ?
Une psychogénéalogiste protestante
On doit à Anne Ancelin Schützenberger d’avoir découvert dans les années 1980 la puissance du lien transgénérationnel et élaboré les grands principes de la psychogénéalogie, alors qu’elle travaillait, en tant que psychothérapeute, auprès de patients atteints de cancer.
En s’intéressant de plus près à leur histoire, elle a constaté que certains reproduisaient des comportements ou des logiques déjà présentes chez leurs parents ou grands-parents, et même que ces phénomènes se manifestaient à des âges équivalents. Fallait-il y voir une forme de fatalisme ou de destin, ou était-ce la trace de souvenirs et mémoires enfouis, et qui resurgissaient quelques générations plus tard ? Elle en fit d’abord le constat, largement étayé par les études et recherches qu’elle développa ensuite, avant que la science ne lui donne raison il y a une quinzaine d’années, avec la compréhension des effets de l’épigénétique. Nous reviendrons sur ce dernier point dans un de nos épisodes.
Ce que l’on observe concrètement, c’est que certains individus vont accumuler les échecs, fonctionner avec des croyances puissantes, ou répéter des schémas dans leur existence, sans qu’ils puissent rationnellement le contrôler, ni l’empêcher, comme si quelque chose de plus fort qu’eux était en action.
Ceci se manifeste sous différentes formes dans leur vie professionnelle ou personnelle : incapacité à faire reconnaître ses mérites ou à obtenir une promotion ou une gratification, tendance à donner facilement sa confiance ou à être trahi, difficultés à créer un couple ou à concevoir un enfant, problèmes financiers récurrents, jusqu’à des maux physiques dont il est compliqué d’établir l’origine, et donc le traitement.
Par où commencer ?
Il faut partir d’une problématique individuelle, dont on va tenter de libérer les éventuelles causes inconscientes en comprenant leurs racines familiales. Il s’agit toujours d’une hypothèse, qu’il va falloir vérifier en explorant son arbre. Un thérapeute transgénérationnel ou un psychogénéalogiste* peut accompagner ce travail, mais on peut l’anticiper seul, en réalisant son propre génosociogramme, l’outil indispensable à tout travail sur le transgénérationnel. Inutile de remonter à la Révolution française, une recherche sur quatre générations s’avère déjà opérante.
Je vous invite à rassembler les informations dont vous disposez sur trois générations au-dessus de vous : dates de naissance, de mariage, de décès, prénoms, patronymes… On peut y ajouter des anecdotes plus personnelles pour certains membres de la famille, que ces histoires soient réelles, ou qu’elles aient été véhiculées oralement, comme faisant partie de la légende de la personne, et illustrant le roman familial – l’ensemble des récits et mythes communs à une même famille.
Un génosociogramme peut se représenter visuellement sur une feuille de papier de grand format, ou son équivalent digital, pour avoir toutes ces informations sur un seul document.
Voici comment constituer votre génosociogramme :
– Choisissez un support de format assez large (A3, en paysage),
– Représentez si possible 4 générations (vous + vos parents, vos grands-parents et arrière-grands-parents, et éventuellement votre conjoint et vos enfants),
– Placez les prénoms, patronymes, date de naissance, de mariage, de décès quand vous les avez – spécialement pour les personnes directement dans votre lignée.
Quelques codes visuels facilitent la lecture du génosociogramme :
– On représente toutes les femmes avec un rond, et tous les hommes avec un triangle
– Les époux mariés sont reliés par une double ligne, ceux qui sont séparés par une double ligne barrée, ceux qui sont divorcés par une double ligne doublement barrée.
– Leurs enfants sont placés en dessous d’eux, dans l’ordre (un triangle pour un garçon, un rond pour une fille). Faire figurer d’éventuelles fausses couches (dans l’ordre) si elles sont connues.
Pour les personnes mariées plusieurs fois, on indique un numéro pour chaque conjoint.
L’élaboration de cet arbre un peu particulier peut se faire en plusieurs fois, et peut prendre quelque temps. Il met déjà en évidence des similitudes que l’on peut entourer/surligner, pour faire des premiers liens entre les générations et certaines personnes, en particulier la répétition de dates similaires (jour et mois), la répétition de prénoms, y compris quand ils figurent en deuxième position, la similitude entre des événements…
La semaine prochaine on se penchera sur l’utilité d’un tel travail, en découvrant les règles de l’inconscient familial.
Pour aller plus loin…
– Aïe, mes aïeux !, Anne Ancelin-Schützenberger, éditions Desclée de Brouwer, 2015 (dernière édition)
– Exercices pratiques de psychogénéalogie. Pour découvrir ses secrets de famille, être fidèle aux ancêtres, choisir sa propre vie, Anne Ancelin-Schützenberger, Editions Petite bibliothèque Payot, 2017
* Il n’y a pas à proprement parler d’annuaires officiels et fiables de psychogénéalogistes ou de thérapeute transgénérationnel. Privilégier les personnes ayant une formation en psychothérapie, ou psychanalyse, lire les avis..