Déjà trois ans qu’Albert Dupontel nous livrait sa redoutable adaptation cinématographique de l’œuvre de Pierre Lemaître Au Revoir Là-Haut, qui faisait déjà suite à cinq autres réalisations dont les, devenus classiques, Bernie, Enfermés dehors ou 9 mois ferme. C’est donc peu dire que de parler de bonheur et de hâte pour découvrir son nouveau film, Adieu les cons, qui sort ce mercredi 21 octobre sur les écrans, en pleine période où le cinéma peut tant offrir à nos esprits et nos âmes parfois perdus et en tout cas bien malmenés.
Lorsque Suze Trappet apprend à 43 ans qu’elle est sérieusement malade, elle décide de partir à la recherche de l’enfant qu’elle a été forcée d’abandonner quand elle avait 15 ans. Sa quête administrative va lui faire croiser JB, quinquagénaire en plein burn out, et M. Blin, archiviste aveugle d’un enthousiasme impressionnant. À eux trois, ils se lancent dans une quête aussi spectaculaire qu’improbable.

Dans Adieu les cons, on retrouve forcément les obsessions de l’acteur-réalisateur. C’est cette bataille contre le temps qui passe trop vite, c’est le poids des structures, du pouvoir, de l’autorité bête et méchante, ce sont ces choix qu’on nous impose mais aussi ceux que nous n’arrivons pas à manifester et qui nous bloquent et nous détruisent, ce sont ces peurs qui nous sclérosent… et puis c’est un tableau de maître où l’on découvre ceux que l’on ne voit pas ailleurs… des gueules brisées, des gens banals et bienveillants, des handicapés de la vie (qui ne doivent pas aller en prison ! J). C’est comme-ci, encore une fois, Dupontel invitait sur sa pellicule les mêmes qui se retrouvent finalement également invité au festin des noces de la parabole du Christ (dans Matthieu 22). Une parabole qui contient, faut-il le rappeler, l’offre gratuite de l’Évangile qui s’étend à tous les êtres humains sans distinction, mais qui rappelle également que l’acceptation de l’offre n’est pas sans conséquence.
Et des conséquences pour ses « héros », il y en a aussi dans Adieu les cons, heureuses et dramatiques car Dupontel ne fait pas dans le pathos. Il bouscule franchement nos émotions, nos bons sentiments. Il malmène nos gentilles intentions… Il se colle à la vie qui nous gratifie du sublime et de l’épouvantable, sans savoir pourquoi et comment parfois, sans maitriser tout mais malgré-tout en choisissant.
Je pourrai encore bien sûr vous dire que Virgine Effira est sublime et tellement juste dans son interprétation. Qu’Albert est terriblement touchant. Que Berroyer, Ughetto ou Nicolas Marié percent l’écran et que Marilou Aussilloux (à voir aussi actuellement dans La Révolution sur Netflix), pendant ses quelques minutes est d’une beauté rare. Je pourrai aussi souligner la qualité de la photo du chef-opérateur Alexis Kavyrchine qui touche au sublime. Je pourrai faire des comparatifs élogieux et tout à fait légitimes avec d’autres réalisateurs comme Jean-Pierre Jeunet ou Terry Gilliam… je pourrai encore et encore…
Mais je préfère m’arrêter là et vous dire tout simplement que toute la poésie, la délicatesse, l’audace et le talent qui débordent d’Adieu les cons ne pourront hélas vous faire le moindre bien si vous passez à côté et que vous ne décidez pas de prendre cette heure trente pour vous poser, regarder et… sans aucun doute, apprendre un peu plus à aimer.
