La notion de sacrifice est centrale dans la Bible hébraïque ; elle est bien présente dans le Nouveau Testament et nous la croisons régulièrement dans le champ religieux. Le sacrifice constitue l’un des ressorts de l’humanité, mais il est régulièrement convoqué dans les discussions sans avoir été pensé autrement que par le dégoût personnel qu’il peut inspirer. Moshe Halbertal est professeur de philosophie à l’université hébraïque de Jérusalem et a enseigné à la School of Law à l’université de New York.
Il aborde la question du sacrifice en mettant à profit sa familiarité avec la pensée juive et ses connaissances philosophiques. Son étude s’efforce de retrouver le sens du sacrifice et de mettre en évidence de quelles manières ce sens a pu subsister alors que l’institution du sacrifice ne pouvait plus tenir en raison de la destruction du lieu où il pouvait être réalisé : le temple de Jérusalem. Ce sont la charité, la souffrance et la prière qui prirent le relais du sacrifice. S’agissant de la souffrance, précisément, l’auteur relève qu’elle permet une purification : « Elle lave tous les péchés d’un homme. » (Talmud, Berakhot 5a)
Toutefois Halbertal ne s’en tient pas à cette conception traditionnelle du sacrifice. Il ne l’envisage pas dans son usage rédempteur comme l’indique la fin de son chapitre sur la guerre où le sens sacrificiel des uns n’efface jamais le traumatisme subi par ceux qui voient la guerre de leurs propres yeux. Cela conduit l’auteur à s’interroger sur le poids du sacrifice dans le domaine politique : sommes-nous condamnés à agir de manière à ne pas aller à l’encontre du sacrifice de ceux qui nous ont précédés ? […]