En préambule, Patrick Cabanel présente un aperçu de la position des protestants français face à la montée du nazisme en Allemagne, beaucoup d’entre eux passant progressivement du pacifisme absolu à la nécessité de s’armer, en particulier à la suite de l’accord de Munich. Un exemple éclatant de cette tendance est celui de l’écrivain André Chamson. Cette période est marquée par l’expérience de l’Église Confessante et en particulier la condamnation et l’envoi en camp de concentration du pasteur Martin Niemöller. L’auteur signale alors l’influence décisive du théologien suisse Karl Barth.
À la suite de la défaite des troupes françaises et de la signature de l’armistice, les protestants français sont, comme tous leurs compatriotes, partagés entre adversaires et partisans de Pétain. Ce dernier fascine une partie de l’opinion par son passé, son moralisme, son autorité. Dix-neuf parlementaires protestants contre trois (une abstention et cinq absents) votent les pleins pouvoirs. Boegner, président à la fois de la FPF et de l’ERF, est le symbole de cette adhésion. Cependant, dès le premier statut des Juifs (3 octobre 1940), une fissure apparaît qui ne cessera de s’accroître avec l’aggravation de la politique anti-juive, et la rupture est presque totale avec le second Statut du 2 juin 1941. Toutefois Patrick Cabanel rappelle l’existence, très minoritaire, du mouvement protestant Sully, foncièrement antisémite et qui persistera jusqu’à la fin de la guerre.
Le point fort de cette évolution se situe à la rencontre de Pomeyrol (Bouches du Rhône) en septembre 1941 avec seize participants dont Willem Visser’t Hooft, trois laïcs: Suzanne de Dietrich, Madeleine Barrot et René Courtin, et douze autres pasteurs. Il en ressort les fameuses thèses dont la 7e: Fondée sur la Bible, l’Église reconnaît en Israël le peuple que Dieu a élu. […]