Dans Les Enfants Rouges, le réalisateur franco-tunisien Lotfi Achour signe une œuvre cinématographique très impactante, inspirée d’un fait réel survenu en Tunisie en 2015 : l’assassinat brutal de Mabrouk Soltani, un jeune berger décapité par des terroristes dans les montagnes de Mghila. Le film, qui sort en salles le 7 mai 2025, transcende la simple reconstitution dramatique pour devenir une méditation sur la souffrance, la dignité humaine et la nécessité de se souvenir.

Alors qu’ils font paître leur troupeau dans la montagne, deux adolescents sont attaqués. Nizar, 16 ans, est tué tandis qu’Achraf, 14 ans, doit rapporter un message à sa famille.

Le film s’ouvre sur une scène de violence : deux adolescents, Nizar et Achraf, sont attaqués alors qu’ils gardent leur troupeau. Nizar est tué, et Achraf, âgé de 14 ans, est contraint de rapporter la tête de son cousin à la famille, devenant ainsi le messager d’une tragédie indicible. Ce périple initiatique, entre réalité et hallucinations, est une plongée dans le traumatisme et la résilience d’un enfant confronté à l’horreur.

Achraf, interprété avec une sincérité bouleversante par Ali Helali, incarne la figure du témoin silencieux, porteur d’une douleur qui dépasse les mots. Son voyage devient une quête de sens, une tentative de réintégrer une communauté brisée et de retrouver une forme de paix intérieure.

Une critique sociale et politique

Au-delà du drame personnel, Les Enfants Rouges dénonce l’indifférence des autorités et la marginalisation des régions rurales en Tunisie. Le film met en lumière l’abandon des populations face à la menace terroriste et l’inaction de l’État, soulignant ainsi les fractures sociales et politiques du pays. Le réalisateur Lotfi Achour, connu pour son engagement social, utilise le cinéma comme un outil de mémoire et de dénonciation. En mettant en scène des acteurs non professionnels issus des mêmes milieux que les personnages, il renforce l’authenticité et l’impact émotionnel de son œuvre.

Une esthétique entre réalisme et onirisme

La photographie de Wojciech Staroń capture avec finesse les paysages arides de la montagne tunisienne, symboles de l’isolement et de la dureté de la vie rurale. On peut observer une véritable mise en espace de cette histoire, comme au théâtre. Le film oscille ainsi entre un réalisme cru et des séquences oniriques, reflétant l’état mental d’Achraf et sa tentative de survie psychologique.

Cette approche esthétique permet au spectateur de ressentir la confusion et la détresse du jeune protagoniste, tout en offrant des moments de beauté et de répit au cœur de la tragédie.

Une résonance spirituelle

Dans Les Enfants Rouges se profilent des thèmes profonds tels que le sacrifice, la souffrance innocente et la quête de rédemption. Achraf, en portant la tête de son cousin, devient à la fois un porteur de douleur et d’espérance. Le film rappelle également l’importance de la mémoire collective et de la compassion face à l’injustice. Il invite à une réflexion sur notre responsabilité envers les plus vulnérables et sur la nécessité de ne pas détourner le regard de la souffrance humaine.

Les Enfants Rouges est une œuvre cinématographique majeure qui allie une narration poignante à une réflexion profonde sur la condition humaine. Elle interpelle notre conscience et nous rappelle l’importance de l’empathie, de la justice et de la mémoire. Entre douleur et dignité, elle interroge le regard que nous portons sur la mort, la mémoire et l’humain.