Carnet de route de théologiens chargés de la formation pastorale dans la francophonie protestante en Afrique de l’Ouest.

Cela faisait des années que je n’étais pas retournée en Afrique comme on dit. Comme s’il était possible de condenser la diversité du continent africain en une notion unique !… Des années à imaginer ce qui se vit sur place, nourrie d’informations venant d’envoyés sur le terrain, mais aussi des clichés que nous trimbalons tous et des images dont les media nous bombardent souvent. La Centrale de Littérature Chrétienne Francophone, centre de ressource, de partage et d’échanges internationaux de la francophonie protestante basé en Alsace, m’a donné l’occasion, avec sa secrétaire générale Joan Charras- Sancho, de découvrir par moi-même une part de la réalité. Nous avons rencontré des partenaires chargés de la formation pastorale au Bénin, au Togo et en Côte d’Ivoire, tout juste au moment des attentats de novembre. Du coup notre démarche a pris encore plus de sens en redécouvrant sur le terrain combien la lecture, l’éducation et la formation au débat sont les atouts incontournables du bien vivre ensemble et du développement durable.

Promouvoir la lecture pour tous

Quel plaisir de découvrir que garçons et filles sont scolarisés à l’école primaire à plus de 90 % au Bénin et au Togo, à 61,5 % en Côte d’Ivoire, de voir les files indiennes de jeunes marcheurs le long des routes aux heures d’entrée et de sortie des écoles et lycées. Quelle belle surprise de retrouver dans les bibliothèques des instituts de formation pastorale des outils d’exégèse biblique et des ouvrages d’horizons théologiques très divers. De voir qu’ils ne sont pas rangés dans l’étagère Cadeaux dont on ne sait que faire, et ce pas même dans les instituts d’Eglises qui, sous nos latitudes, ont une lecture de la Bible plutôt fondamentaliste, un profil très marqué et assez peu enclines au dialogue interconfessionnel. Et d’entendre bibliothécaires et professeurs les espérer en plus grand nombre !
Et je ne vous dis même pas notre étonnement ravi quand la bibliothécaire de l’Institut Pastoral Hébron de Bouaflé nous a expliqué son projet de faire de la bibliothèque de l’institut une bibliothèque de quartier, ouverte à tous, femmes, enfants, collégiens tous confondus, pour promouvoir la lecture pour tous…

Des imams chez les pasteurs

Actualité oblige, nous avons demandé quelles étaient les relations des pasteurs et responsables d’Eglise avec les représentants locaux musulmans. Chacun nous a répondu son soulagement de vivre dans un pays où l’Islam est modéré. Les Béninois de Porto Novo nous ont même estomaquées en évoquant les 3 ou 4 pastorales annuelles qu’ils avaient avec les imams de la ville… Ailleurs on nous a aussi regardées avec un joli sourire dans le regard : comment ne pas être en dialogue alors que dans chaque famille, dans chaque village, les différentes confessions sont représentées : « on vit ensemble ce qu’il est possible de partager comme fêtes ou rites et on apprend ensemble à accepter que l’un ou l’autre s’abstienne à certaines occasions…» Bien sûr, ce n’est pas partout et à chaque fois aussi simple. Mais l’esprit est là.

Quant à la vie d’Eglise, elle se transforme, elle aussi, à toute vitesse. Mais ça, c’est un autre chapitre !…