Les dogmes mariaux
Ces différents textes dessinent le portrait d’une mère admirable, mais la Bible ne dit rien de sa naissance ni de ses parents, pas plus que de sa mort. Le culte marial a largement débordé les affirmations bibliques. On comprend trop bien les raisons qui ont conduit à son développement : on a tous envie d’avoir une maman au ciel qui veille sur nous ! Lorsque la première Église s’est développée dans des villes qui avaient érigé des temples dédiés à Artémis, Athéna, ou Aphrodite, il était tentant de trouver une figure féminine pour les remplacer. Nous touchons là une différence fondamentale entre les deux Églises : le principe protestant est que la Bible est le critère ultime, et qu’il n’est pas sage d’aller au-delà de ce qu’elle dit de Marie.
Nous pouvons évoquer deux exemples dans lesquels les dogmes mariaux se sont éloignés de la Marie du Nouveau Testament. Le premier est celui de l’Immaculée Conception. Si Marie a été miraculeusement épargnée par le péché dès sa naissance, elle sort de l’humanité dans laquelle elle nous rejoint, car elle n’est plus dans la même catégorie que nous. C’est comme si on nous donnait comme exemple les anges qui sont proches de Dieu, ou si on nous disait que les oiseaux n’ont qu’à battre des ailes pour monter au ciel ! Comme nous ne sommes ni anges ni oiseaux, cela nous concerne peu. Rendre à Marie son humanité toute simple et son statut de pécheresse-pardonnée, c’est lui redonner cette proximité qui en fait une sœur dans la foi, et même une grande sœur, car elle parle à notre propre oui, à notre reconnaissance, à nos hésitations et à notre fidélité.
Le second dogme à interroger est celui de la virginité perpétuelle de Marie. Il se heurte d’abord au verset de l’évangile de Matthieu qui dit à propos de Joseph : « Il n’eut pas de relations avec elle jusqu’à ce qu’elle eût mis au monde un fils, qu’il appela du nom de Jésus[1]. » Ensuite, comment ne pas entendre que ce dogme est le fruit de la méfiance de la première Église vis-à-vis de la sexualité ? Sous l’influence de la morale pythagoricienne, les pères de l’Église ont souvent limité la sexualité aux nécessités de la reproduction. Au sein de cet univers mental, on comprend que l’Église ait promulgué le dogme de la virginité perpétuelle de Marie. Le problème est que de nos jours, l’Église tient un autre discours sur la sexualité alors qu’elle a conservé le dogme.
[1] Mt 1.25.