Lorsque le pasteur Krieger, président de la Fédération protestante lui demande si les sœurs ont bien élu sœur Anne pour prieure, sœur Constance, la doyenne de la communauté, clame d’une voix étonnamment forte pour sa frêle stature : « Je l’atteste. » Presque un cri.

Charge d’unité

Et tout est dit là : la conviction de l’élection, le soutien de l’inspiration qui l’a suscitée, la puissance de l’attestation elle-même. Dans un sourire, l’officiant se tourne vers sœur Anne pour recevoir son consentement avant que la charge ne passe d’une prieure à l’autre, comme un relais. La chapelle est pleine, l’immense tente dressée pour l’occasion aussi, quelques mouchoirs apparaissent aux creux des mains. C’est que cette célébration est d’une simplicité et d’une profondeur à fleur d’âme.

À travers la lecture de la Règle de Reuilly, qui fonde la vie de la communauté, on perçoit alors toute la réalité de cette mission si particulière du « service de l’unité » d’une prieure. Il ne s’agit de rien de moins qu’instruire les sœurs dans la recherche de Dieu, les aider à vivre leur vocation et rechercher inlassablement les chemins de partage avec ceux qui croisent la route de la communauté : le poids de la charge est palpable, presque physiquement. Et l’on ressent dans le même temps sur ce chemin de service, à travers la prédication de Céline Rohmer, un Dieu qui vient lui-même à la rencontre de sa prieure pour alléger ce qui n’est dès lors plus un fardeau. Sans la sève qui le traverse, le sarment de la vigne serait incapable d’accueillir le moindre fruit.

Évoluer en permanence

C’est que la tâche est immense pour les sœurs, dans ce monde en constante mutation. Porteuses d’une parole d’accompagnement de la vie, portées elles-mêmes par la prière et la méditation de la Bible, conduites par la Règle de Reuilly, elles sont un de ces points d’ancrage dont la société a besoin.

Ces dernières années, une évolution presque insensible mais extrêmement […]