Après moult déplacements et une pré-campagne agitée, c’est désormais officiel. “Il n’est plus temps de réformer la France, mais de la sauver. C’est pourquoi j’ai décidé de me présenter à l’élection présidentielle”, a déclaré Éric Zemmour, mardi 30 novembre, dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux. On y voit le polémiste d’extrême droite lire un texte aux accents dramatiques et nostalgiques, relève Le Monde. Celui-ci est entrecoupé d’images d’archives et de sa campagne sur lit de symphonie de Beethoven. Par ailleurs, la scénographie est copiée sur l’appel du 19 juin du général de Gaulle : un vieux micro est posé sur le bureau pendant que Éric Zemmour annonce sa candidature à la présidentielle 2022 devant une bibliothèque sombre.
L’air grave et les yeux rivés sur son texte, Éric Zemmour crache un discours apocalyptique sur l’état du pays. Défilent d’abord des images de violences, puis celles de sa France rêvée (de Gaulle, Jeanne d’Arc, Napoléon). Un pays “tellement intelligent” qui, selon lui, “est en train de disparaître”. À plusieurs reprises, il fait référence à la théorie raciste et complotiste du grand remplacement, s’adressant à ceux qui se sentent “étrangers dans leur pays”, aux “exilés de l’intérieur”. “L’immigration n’est pas la source de tous nos problèmes même si elle les aggrave tous”, avance le candidat. Il entend être le porte-parole des Français qui sont “méprisés par les puissants, les élites, les bien-pensants, les journalistes, les politiciens, les universitaires, les sociologues, les syndicalistes, les autorités religieuses”.
Demande de retrait immédiat de certaines images
Mercredi matin, la vidéo de l’ex-éditorialiste de CNews et du Figaro comptait 2 millions de vues sur YouTube. Mais, à la suite de la diffusion de ce clip, de nombreux médias et personnalités ont fustigé l’utilisation par Éric Zemmour de leurs images sans leur accord. Certains l’ont même menacé de poursuites judiciaires. “BFMTV et LCI ne diffusent plus la vidéo de Zemmour. Plusieurs extraits ont été utilisés sans l’accord des auteurs. C’est le cas du film Jeanne d’Arc (Gaumont). Ou d’images du journaliste Clément Lanot. Les deux envisagent des poursuites. L’amateurisme est total”, a tweeté le média indépendant Les Jours. Le réalisateur Luc Besson a annoncé avoir saisi son avocat “pour engager les poursuites nécessaires” après l’utilisation “frauduleuse” d’images de son film Jeanne d’Arc (1999).
D’après l’AFP, Jacques Attali a adressé une mise en demeure à Éric Zemmour de retirer sous 24 heures son image du montage vidéo. “En cas de refus de votre part ou d’absence de réponse je saisirai le juge compétent”, a-t-il écrit dans une lettre au polémiste. Gaumont assure n’avoir reçu “aucune demande” de la part des équipes de Zemmour pour l’utilisation des images de deux films dont la société détient les droits : “Nous allons étudier toutes les options qui s’ouvrent à nous”. France 24 s’est opposé “par principe à l’utilisation de ses images et de son logo dans tout clip de campagne politique”. “En conséquence, celle-ci va demander le retrait immédiat de ces images dans ce clip et étudiera les recours légaux s’il n’est pas donné suite à sa demande”, a ajouté le média. De leur côté, France Télévisions, l’Ina et Radio France ont conjointement déclaré : “Il conviendra que Éric Zemmour s’acquitte des droits des images reprises comme tout le monde”.
Une “sinistre mise en scène”
Alors que l’équipe d’Éric Zemmour s’est défendue de ces critiques en citant le droit dit “de courte citation”, Le Parisien, qui réalise aussi des vidéos, a déploré l’utilisation de ses images “qui n’ont pas vocation à servir quelconque candidat”. “On a fait un signalement auprès de YouTube comme on le fait habituellement quand d’autres comptes utilisent nos images sans nous l’avoir demandé”, a précisé Pierre Chausse, directeur délégué de la rédaction. D’après ce même média, Éric Zemmour aurait insulté Gilles Bouleau de “connard” à la sortie du 20 Heures de TF1. Tendu face au présentateur, il lui a reproché de ne pas l’avoir interrogé sur son projet. Éric Zemmour a dénoncé “une interview d’un procureur” et “une escroquerie intellectuelle”. Son premier meeting se tiendra dimanche au Zénith de Paris, où des militants antifascistes, la CGT et Solidaires ont promis de manifester pour faire “taire Zemmour”.
Les réactions politiques ne se sont pas fait attendre. Un discours “lugubre”, a commenté Sébastien Chénu, du RN, visiblement irrité par cette candidature qui mord les plates-bandes de Marine Le Pen. Gauche et droite n’ont pas mâché leur mot. Olivier Faure, du PS, a évoqué une “sinistre mise en scène”. Jean-Luc Mélenchon, chef de file de la France insoumise, a qualifié le polémiste d’“obsessionnel de la tradition”, pendant que Damien Abad, de LR, parle d’un candidat qui souhaite “fracturer” la France. Après l’annonce de cette candidature, qui intervient quand les sondages le concernant tournent autour de 13% d’intentions de vote au premier tour, derrière le président sortant Emmanuel Macron (23-24%) et Marine Le Pen (19-20%), le plus dur commence pour Éric Zemmour. Il doit récolter 500 parrainages d’élus même si son camp assure s’appuyer sur 250 à 300 promesses de parrainages.