L’évangile du dimanche 29 septembre
26.09.2021 : Marc 9.38-48 – Les causes de chute
L’Évangile du verre d’eau
Introduction
Après avoir appelé ses disciples à l’accueillir comme un enfant, les disciples n’ont toujours pas compris car ils ne supportent pas qu’un homme guérisse au nom de Jésus sans faire partie du groupe des disciples. Ils essayent de l’en empêcher, ce qui représente la première des disputes théologiques qui ont ravagé l’Église au long de son histoire.
Jésus répond en développant l’évangile du verre d’eau : « Quiconque vous donnera à boire une coupe d’eau parce que vous appartenez au Christ, amen, je vous le dis, il ne perdra jamais sa récompense. »
Points d’exégèse
Attention sur deux points.
Titre : L’Église et la secte
Les disciples disent : « Celui qui n’est pas pour nous et contre nous », alors que Jésus dit : celui qui n’est pas contre nous est pour nous. C’est toute la différence entre la secte et l’Église. La secte rejette tout ce qui n’est pas elle alors que l’Église accueille avec un regard favorable tout ce qu’il y a de positif dans l’humain.
Ce verset rend hommage à ceux qui font le bien sans faire partie d’une Église.
Titre : L’occasion de chute
Jésus poursuit son enseignement en appelant à ne pas être une occasion de chute pour un petit. Le verbe utilisé est skandalizô qui a donné scandale en français. Le skandalon est la pierre qui est sur le chemin, l’obstacle qui fait chuter.
Jésus précise qu’il vaut mieux perdre une main ou un œil que de faire chuter un petit.
Pistes d’actualisation
1er thème : Exorciste, un chrétien anonyme ?
Jésus répond à la proposition des disciples d’empêcher ceux qui n’agissent pas au nom du Christ en proclamant l’évangile du verre d’eau.
On trouve à l’extérieur de l’Église des humains qui font œuvre de compassion et qui parfois honorent plus le Christ que les disciples. Le monde n’est pas à rejeter dans les ténèbres car on trouve en son sein des humains qui ne sont pas disciples, mais qui ne perdront pas leur récompense.
Dans Les frères Karamazov, Dostoïevski raconte l’histoire d’une vieille et méchante femme qui, une fois dans sa vie, donne un oignon à un mendiant. Quand la femme meurt et va en enfer, un ange descend et s’approche d’elle, un petit oignon à la main. La femme s’y agrippe, et c’est ainsi qu’elle échappe à l’enfer.
2e thème : Couper la main : la radicalité de l’accueil
L’évangile du verre d’eau s’oppose à l’évangile de la main coupée et de l’œil arraché qui est le signe d’une radicalité extrême.
L’évangile de Jésus appelle à une radicalité, mais c’est la radicalité de l’accueil et de la protection du petit. Les disciples doivent se couper la main chaque fois que leur main juge et condamne.
Une légende raconte qu’un jour Jésus se promenait avec ses disciples et ils voient un chien mort au bord de la route. Les disciples disent : « Que cette charogne est horrible » et Jésus répond : « Que ses dents sont blanches ! » Il voulait enseigner à ses disciples une conversion du regard pour exercer leurs yeux à voir le bien.
3e thème : Le petit comme clef de discernement
Le pire, c’est de faire chuter le petit que Jésus place au cœur de l’éthique du disciple. Dans chaque situation, on peut se demander qui est le petit qu’il ne faut pas faire chuter. C’est lui qui devient prioritaire et à partir de lui qu’on doit se comporter.
Dans la parabole du jugement dernier, Jésus a déclaré : « Amen, je vous le dis, dans la mesure où vous avez fait cela pour l’un de ces plus petits, l’un de mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. » (Mt 25.40).
Une illustration
Dans un de ses livres, Kahil Gibran raconte l’histoire d’un homme qui entreprend un grand voyage pour visiter une ville dans laquelle tout le monde vit selon l’Évangile. Au moment où il entre dans la cité, il s’aperçoit que tous les hommes sont borgnes et manchots. Il interroge les habitants : Est-ce vraiment là la Ville Bénie, où tout le monde vit selon l’Évangile ? Que vous est-il arrivé pour avoir tous perdu l’œil et la main ? Les habitants l’invitent à le suivre et le conduisent jusqu’au temple qui est au centre de la ville. À l’intérieur de ce temple se trouve un amoncellement d’yeux et de mains, tout flétris. Devant la colère du visiteur qui se demande quel ennemi a pu commettre une telle cruauté, les habitants répondent : C’est nous qui avons agi de notre plein gré. Dieu nous a aidés à vaincre le mal qui était en nous. Et de citer le passage de l’évangile que nous méditons. Le visiteur insiste : N’y a-t-il vraiment personne dans votre ville qui ait deux yeux et deux mains ? Les habitants répondent : Seuls ceux qui sont trop jeunes pour lire l’évangile sont entiers. L’histoire se conclut ainsi : Le visiteur s’empressa de quitter la Ville Bénie, car il n’était plus trop jeune et il pouvait lire l’Écriture.
Le livre de Jacques du dimanche 29 septembre
Jc 5.1-6 – Contre les riches injustes
Le contexte – L’épître de Jacques
Depuis plusieurs semaines nous suivons l’épître de Jacques qui donne des commandements pratiques sur la vie en Église. Parmi ces commandements, il revient à trois reprises sur la relation entre les riches et les pauvres (Jc 1.9-11, 2.1-13, 5.1-6).
La première raison est une question de justice sociale, mais le passage de cette semaine apporte un second argument, c’est que la richesse peut être injuste, et notamment nous fermer à la grâce. Ce passage est un commentaire du verset de l’Évangile qui dit qu’il est difficile à un riche d’entrer dans le Royaume de Dieu, la raison en est que ses richesses hurlent aux oreilles du riche : « Confie-toi à nous ! »
Que dit le texte ? – Les richesses injustes
Notre texte concerne particulièrement le riche qui est enfermé dans ses richesses et le riche dont les richesses sont injustes, car elles se sont constituées sur le dos des travailleurs.
Le passage se termine par une accusation forte : Vous avez assassiné le juste. En illustration de cette parole, le Père grec Basile le Grand appelait ses contemporains à la responsabilité pendant la famine qui ravageait la Cappadoce : « Il appartient à celui qui a faim, le pain que tu gardes ; à celui qui est nu, le manteau que tu conserves dans tes coffres ; à celui qui est sans chaussure, la chaussure qui pourrit chez toi ; au pauvre, l’argent que tu tiens enfoui. »
Dans l’évangile, Jésus a appelé l’argent Mamon pour souligner son caractère diabolique. L’argent est utile car il permet la division du travail et le développement des nations, mais il a tendance à prendre possession du cœur de celui qui le possède. Comme le dit un proverbe oriental : « Entre la soif d’eau et la soif d’argent il y a une grande différence : quand on a bu de l’eau on est désaltéré. » Il suffit de regarder autour de nous pour observer des hommes qui ont tout sacrifié – leurs principes et leur éthique, leur honneur et leur bonheur – pour augmenter leurs richesses.
On dit que l’argent est un bon serviteur et un mauvais maître, le problème est que lorsqu’on veut en faire son serviteur il a tendance à devenir son maître.
Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – Les causes de chutes
Dans l’évangile, Jésus appelle à couper sa main si elle est une occasion de chute. Comment ce principe peut-il s’appliquer à notre relation à l’argent ? Un principe veut que pour combattre un effet négatif, il faut cultiver l’effet inverse.
Une bonne façon de casser le pouvoir que l’argent a tendance à exercer sur nous est de le partager, le donner. Jacques Ellul faisait remarquer que la logique de l’argent était celle de l’accumulation et du commerce, ce qui le positionne à l’opposé du registre de la grâce qui induit le don et la gratuité. Donner une partie de son argent revient à l’utiliser comme un signe de grâce, soit à pervertir sa logique et casser la fascination qu’il exerce sur nous.
Il ne faut pas mépriser l’argent, car il est précieux, mais il faut le partager pour éviter qu’il ne nous domine.
Le livre des Nombres du dimanche 29 septembre
29.09.2024 : Nb 11.25-29 – Un peuple de prophètes
Les institutions et les charismes
Le contexte – Le livre des Nombres
Le livre des Nombres est un autre récit de l’Exode qui se concentre sur la période du désert. Il rapporte un certain nombre de récits qu’on ne trouve pas dans les autres livres de la Torah, comme la nomination de soixante-dix anciens pour seconder Moïse. Lorsque ce dernier se plaint au Seigneur parce que sa charge est trop lourde, ce dernier lui propose de nommer des anciens et des secrétaires pour le seconder.
Dans le désert, Moïse a fait de la politique en organisant la vie commune du peuple, pour cela il a nommé des juges, des prêtres et des anciens, ce qui est une ébauche de partage du pouvoir entre le judiciaire, le religieux et le politique. L’idée générale est le principe de subsidiarité selon lequel les décisions doivent être prises au plus près des personnes concernées.
Que dit le texte ? – Les anciens et les prophètes
Dieu demande à Moïse de rassembler les soixante-dix anciens qu’il a désignés près de la tente de la Rencontre. Dieu les bénit et pose sur eux une partie de l’esprit qui était sur Moïse afin de partager le fardeau. Selon les commentaires rabbiniques, Moïse n’a rien perdu pour autant de son inspiration, selon l’image de la torche qui partage sa flamme tout en conservant l’intégralité de sa chaleur.
Le texte précise que les anciens ont commencé à parler en prophètes, mais qu’ils ne continuèrent pas. L’illumination les a confirmés dans leur fonction, mais leur responsabilité est avant tout politique, dans l’organisation du peuple.
Une autre lecture plus critique dit que lorsque des inspirés entrent dans une institution, ils perdent leur inspiration.
Sur les soixante-dix anciens, deux ne sont pas à la tente de la Rencontre, ils se mettent pourtant à prophétiser comme les autres. Josué veut les empêcher de parler car ils ne sont pas avec les autres, mais Moïse répond qu’il n’est pas au service d’une organisation, mais d’un souffle. Il y a des chefs qui cherchent à garder leurs adjoints sous leur autorité et des chefs dont le premier souci est que leurs collaborateurs s’épanouissent, qu’ils développent leurs dons et qu’ils prennent leur envol.
Quel est le lien avec le passage de l’Évangile ? – Honorer la diversité des talents
Dans le passage de l’évangile de cette semaine, les disciples sont comme Josué, ils n’apprécient les francs-tireurs, là il s’agit d’un homme qui chasse les démons au nom de Jésus sans faire partie du groupe des disciples. Jésus répond en posant un principe cardinal : Qui n’est pas contre nous et pour nous.
Comme Moïse, Jésus pense que les institutions sont utiles, mais qu’il faut rester à l’écoute du réel et savoir laisser une place aux initiatives individuelles. Il ne faut jamais inverser la place de chacun : les institutions sont au service de la vie et non l’inverse. C’est en fonction de ce critère que nous pouvons entendre la fin du passage qui dit que notre main est une occasion de chute, il faut la couper. La chute ici, c’est d’oublier la diversité des dons et de vouloir faire entrer les charismes dans une organisation.
Les disciples doivent être intransigeants pour laisser leurs institutions ouvertes et à l’écoute des talents particuliers.
Production : Fondation Bersier – Regards protestants
Intervenants : Laurence Belling, Antoine Nouis