Au XVIe siècle, Luther rejette l’extrême onction et toute cérémonie entourant la mort au motif que le Christ n’a institué que deux sacrements (baptême et sainte cène) et seulement pour les vivants. La Réforme transforme ainsi l’attitude devant la mort : les défunts étant dans la main de Dieu, il est impossible pour les vivants d’influencer le sort des morts et il n’y a pas lieu de prier pour eux. La mort et l’enterrement se placent en dehors de l’Église. Le pasteur ne doit même pas être présent à l’enterrement. Le lieu d’ensevelissement est indifférent.

Plus sévères encore que les luthériens dans leur rejet des pratiques catholiques, les réformés vont jusqu’à interdire l’éloge du défunt. Calvin exigera d’être enterré dans un lieu ignoré de tous.

Sous la pression des familles et pour éviter des conversions au catholicisme, une évolution s’est produite à la fin du XIXe siècle : depuis cette époque, les pasteurs président les cultes de service funèbre au temple, ou dans un autre lieu, mais ces services s’adressent aux vivants. Ils ont pour but d’annoncer l’Évangile en vue de la consolation des affligés, de l’édification de l’Église et de l’évangélisation. On ne prie pas pour le mort, toutefois la liturgie luthérienne du service funèbre comporte une remise du défunt à Dieu, qui est une sorte de bénédiction du mort.

La cérémonie dite « service d’actions de grâce » est toujours très demandée, même dans les familles peu pratiquantes. Il ne doit pas y avoir de panégyrique du défunt mais, très souvent, des membres de la famille et des amis apportent leur témoignage pendant la cérémonie.

Celle-ci se déroule en général, mais pas toujours, en présence du corps du défunt. Dans certains lieux du Languedoc et des Cévennes, le cercueil n’est pas admis dans les temples réformés. L’inhumation au cimetière a lieu en présence du pasteur. Elle peut précéder le service au temple.

Aujourd’hui, l’Église ne refuse pas son assistance à ceux qui la demandent dans le deuil. Les statistiques de l’Église réformée de France révèlent d’ailleurs une proportion importante de célébrations de services demandés par les familles pour des non protestants.

Cimetières et lieux d’enterrement des protestants

En France dans la deuxième moitié du XVIe siècle, les enterrements des protestants ne sont plus possibles dans la terre « sacrée » des cimetières et même dans les terrains les jouxtant. L’édit d’Amboise en 1562 leur impose l’enterrement de nuit, c’est-à-dire à la pointe du jour ou au couchant. L’édit de Nantes en 1598 accorde officiellement aux protestants des lieux pour installer leurs cimetières dans lesquels ils ont le droit d’enterrer leurs morts de jour. Trois cimetières protestants sont officiellement utilisés à Nîmes.

A partir de la Révocation de l’édit de Nantes (1685), le culte est interdit et par conséquent aussi l’enterrement des pratiquants. C’est dans la clandestinité que les protestants doivent enterrer leurs morts. Les protestants des villes utilisent les caves de leurs maisons ou leurs jardins, tandis que dans les propriétés rurales un champ est consacré à l’ensevelissement, d’où la multitude de petits cimetières privés dans les Cévennes, le Languedoc et le Poitou, d’ailleurs encore en usage aujourd’hui.

En 1736, il est institué une procédure devant le juge permettant l’inhumation des réformés. Dans cette procédure laïque, le curé, qui avait le monopole de l’état civil, n’intervient plus : le roi pouvait ainsi savoir qui mourrait dans son royaume et vérifier les conditions d’inhumation. En 1776, pour des raisons de salubrité publique, des lettres patentes du roi imposent le transfert des cimetières hors des agglomérations. L’édit de tolérance de 1787 permet à nouveau aux protestants d’enterrer leurs morts dans des cimetières. Les municipalités doivent fournir un cimetière aux sujets non catholiques et des cimetières protestants peuvent à nouveau être créés.

Aujourd’hui les protestants sont enterrés dans les cimetières municipaux et dans les quelques cimetières protestants qui existent ainsi que dans les tombes privées des propriétés.

La pratique de la crémation est en progression chez les protestants comme dans l’ensemble de la population.