Adieu Gruyère casher, week-ends de ski et tranquillité helvétique: cet automne, le rabbin Elkaïm fait son alyah, soit le « retour » en Israël pour les juifs sionistes. Un exercice dans lequel il est passé expert : c’est la troisième fois qu’il se lance et cette fois, il espère bien que ce sera un aller simple. Les raisons de son départ sont religieuses bien sûr – vivre en Israël est considéré comme un devoir pour de nombreux juifs pratiquants –, mais pas seulement.

Outre le houmous et la météo clémente, parfois torride, le rabbin et sa femme Myriam s’en vont pour des raisons familiales. « Nous ne voyons nos sept petits-enfants que quelques jours par an, ils nous manquent beaucoup. Or, on ne peut pas réussir sa vie professionnelle si l’on n’est pas heureux en privé: il faut faire des choix », dit-il avec une pointe de regret dans son français chantant. Quitter la tranquillité vaudoise ne sera « pas facile, mais on sait où on va, et nous n’avions jamais imaginé résider ailleurs qu’en Israël », affirme-t-il.

L’amour des livres… à l’endroit

Il aura pourtant passé plus de vingt ans à Lausanne, une ville qu’il n’aurait probablement pas pu situer sur une carte avant de mettre les pieds en Suisse. Né en Algérie en 1961, Lionel Elkaïm est issu d’une famille traditionaliste « où l’on pratiquait les commandements, mais sans contrainte et sans rester fixé sur une rigueur absolue ». Après avoir grandi à Nice, il passe son baccalauréat, non à Paris ou Strasbourg, mais… à Montreux. « Sa yeshiva (école d’études juives réservée aux hommes, NDLR) était très prestigieuse. Le taux de réussite au baccalauréat était de quasi 100% même si les matières profanes n’étaient enseignées qu’à 50% », raconte-t-il, un sourire dans la barbe. Bac en poche, direction Israël où à dix-huit ans, il entame des études pour pouvoir devenir professeur de sciences religieuses juives. L’établissement forme bien sûr des rabbins, mais ce n’est pas ce qui l’intéresse, même si son grand-père a exercé cette prestigieuse fonction. « Moi, ce que je voulais, c’était étudier et le meilleur moyen de continuer à apprendre, c’est d’enseigner, car dans le judaïsme, l’un ne va pas sans l’autre. Pour nous, nous former sans transmettre n’a pas de sens », explique Lionel Elkaïm. […]