Après une importante mobilisation au début de l’année 2024, la colère gronde de nouveau dans le monde agricole. La perspective d’un accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays du Mercosur (Paraguay, Uruguay, Brésil, Argentine et Bolivie) est la goutte d’eau qui fait déborder le vase, relate franceinfo. Les agriculteurs comptent faire pression sur le gouvernement pour qu’il respecte les engagements pris pendant la crise agricole et réclamer des revenus plus décents.
La date du lundi 18, retenue par le président de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), Arnaud Rousseau, pour lancer un mouvement d’ampleur, coïncide avec le moment où le G20 devrait se pencher sur l’accord avec le Mercosur. La Coordination rurale, elle, a choisi le 19 novembre, date de son congrès national. La Confédération paysanne, elle, est déjà mobilisée depuis mardi.
« Incohérence européenne »
Les trois syndicats sont en revanche tous d’accord pour dire que l’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les pays du Mercosur est l’élément déclencheur de ce deuxième mouvement de contestations. Pour le leader de la FNSEA, le syndicat majoritaire chez les agriculteurs, la possible adoption de cet accord commercial controversé est la ligne à ne pas franchir. « On sera sur les ronds-points et boulevards d’Europe pour dénoncer cette incohérence européenne déclenchée par l’annonce du Mercosur », a assuré Pierrick Horel, président du syndicat Jeunes Agriculteurs, allié avec la FNSEA, sur RTL.
La Coordination rurale est du même avis. « Le Mercosur, c’est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. On ne veut pas qu’il soit signé, et on souhaite que Monsieur Macron se positionne clairement sur ce sujet », a déclaré à franceinfo Patrick Legras, le porte-parole du syndicat réputé pour ses actions musclées.
Baisse des droits de douane
Le texte entend développer les échanges commerciaux entre les deux marchés communs en supprimant de nombreuses taxes. Et ce, afin de simplifier l’accès au marché européen aux pays du Mercosur. L’objectif est qu’ils puissent exporter vers l’Europe près de 99 000 tonnes de viande bovine, en ne payant que 7,5% de droits de douane. Contrairement à la France, certains pays européens voient d’un bon œil cet accord. D’où la peur ressentie par les agriculteurs français. Ainsi, la Confédération paysanne est mobilisée depuis mardi. Ses membres seront à Paris et à Bruxelles pour protester contre l’accord, mercredi prochain.
Les syndicats sont également d’accord pour dire qu’il y a urgence à augmenter le revenu des agriculteurs. Dans ce but, la FNSEA, la Coordination rurale et la Confédération paysanne, ont mené des actions locales en octobre. Lors de la crise agricole du début d’année, Gabriel Attal, alors Premier ministre, avait pris une soixantaine d’engagements. Certaines mesures sont actuellement discutées au Parlement dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) 2025 et du budget de la Sécurité sociale. Puis, lors du Salon de l’agriculture, Emmanuel Macron avait annoncé l’instauration de prix planchers dans chaque filière. Mais pour la Confédération paysanne « les causes profondes de la crise n’ont pas été traitées. Après ces annonces, il ne s’est rien passé de manière structurelle, et cela a même empiré pour les agriculteurs avec Lactalis qui a rompu des contrats », a indiqué à franceinfo sa porte-parole, Laurence Marandola.
Épizooties et mauvaises récoltes
Parallèlement, l’année 2024 a été compliquée pour les agriculteurs. Ils ont été confrontés à une série de crises sanitaires et d’aléas climatiques. Plusieurs épizooties ont frappé les élevages : la grippe aviaire, la maladie hémorragique épizootique chez les bovins et la fièvre catarrhale ovine. « On n’a pas de solution pour la gestion des risques sanitaires », constate Laurence Marandola, alors que le gouvernement avait annoncé, début octobre, des prêts garantis et 75 millions d’euros pour les éleveurs de brebis touchés par la fièvre catarrhale.
Les céréaliers et les viticulteurs n’ont pas été épargnés. Leurs récoltes ont été mauvaises en raison des conditions particulièrement pluvieuses du printemps et de l’été. « Avec la mauvaise année [climatique] et les problèmes sanitaires, entre 40 et 45% des agriculteurs sont en difficulté », chiffre Patrick Legras.