Au dernier repas de Jésus, partagé avec ses disciples, une femme brise un vase de parfum sur ses pieds. Ce geste provoque l’indignation des disciples qui commentent qu’avec la vente d’un tel vase, beaucoup de pauvres pourraient être secourus. Jésus leur fait cette remarque étrange, en Marc 14.7 : « Car vous avez toujours les pauvres avec vous, et vous pouvez leur faire du bien quand vous voulez, mais vous ne m’avez pas toujours. »
Le fait que nos sociétés engendrent des migrants, des SDF, ou d’autres « pauvres » semble être pour Jésus moins un problème à résoudre qu’une réalité à assumer. Ils seront là quoi que nous fassions. Seule la venue du Royaume y mettra un terme. Ne faut-il rien en faire ? L’impossibilité de « terminer » l’œuvre nous autorise-t-elle à baisser les bras ? Non, nous devons lutter contre le mal dans le monde par le bien. Mais évitons cependant de nous imaginer « résoudre » ces problèmes. Tel un puits sans fond, la misère pourrait engloutir la vie d’une Église toute entière et, ce faisant, la détourner d’autres aspects de sa vocation.
Ceci dit, alors que nous sortons de l’été pour une rentrée chargée d’incertitudes face au virus, alors que nous attendons un retour à la normale, les migrants continuent d’affluer à travers la Méditerranée. Visant une côte européenne quelconque, la grande bleue est transformée en une route migratoire, la plus meurtrière sur le globe actuellement ! Les attitudes pour accueillir cette réalité complexe sont très diverses : rejet systématique des arrivants, désir de soutenir les collectifs d’accueil tout en gardant de la distance, ou carrément désobéissance civile en hébergeant ces personnes en situation irrégulière… Comme nous l’avons dit, si la lutte contre la misère ne fait que démarrer pour l’Église, le souci de cette image de Dieu violentée par une société révoltée contre le Créateur reste un lieu incontournable du témoignage de Jésus.
Avec authenticité et humilité, nous voulons réfléchir ensemble à cette réalité aussi dérangeante que grandissante.