Dans ce livre, tu parles de l’épreuve et de la nécessité de maintenir ensemble deux réalités : la souffrance et la présence du Dieu qui donne vie et espérance. Dans quelles circonstances as-tu fait cette expérience paradoxale ?
En 2008, j’ai eu une toxoplasmose oculaire, puis un deuxième foyer en 2011. Le résultat était une vision de 0,5 sur 10 dans un œil et une baisse de vision dans l’autre. La lecture et les déplacements étaient devenus très problématiques.
Comment concilier la présence, parfois discrète, de Dieu au milieu de la souffrance avec les promesses de délivrance et d’exaucement qui elles aussi sont affirmées dans l’Écriture ?
Si « concilier » veut dire les rendre compatibles ou les mettre en accord, je n’essaie pas de le faire. Nous voyons ces deux réalités dans la Bible sans qu’elle nous explique de quelle manière les concilier. Le livre de Job, surtout le discours de Dieu à la fi n, aurait été un endroit idéal pour le faire. Il est difficile pour l’être humain de maintenir ensemble des positions paradoxales sans nier ni gommer la réalité de l’une au détriment de l’autre. Cela génère beaucoup d’incertitude et d’inconfort, car, dans cette vie, nous ne savons pas à quoi nous attendre : guérison ou non-guérison, amélioration de la situation ou détérioration.
Si nous ne pouvons pas changer nos circonstances, faudrait-il se résigner à la souffrance ?
La résignation est une attitude passive : « à quoi bon ? ». Je subis mes circonstances passivement, sans espoir. Je préfère parler de consentement, c’est-à-dire d’une manière d’accueillir ou d’« habiter » la situation. Il s’agit de chercher à vivre le « nouveau moi » dans des circonstances que je n’ai ni choisies ni ne peux changer. Cette acceptation de la réalité est active. […]