Dans le quatrième volet de cette série sur la place de Dieu face à la maladie, je voudrais aborder une réponse de l’apôtre Paul à travers le fameux récit de l’écharde dans la chair.
Pour entendre le raisonnement de l’apôtre, il faut donner quelques éléments de contexte. Dans l’Église de Corinthe, Paul est critiqué dans son ministère par des hyperspirituels qui lui reprochent de ne pas avoir assez de prestance, de ne pas parler avec assez d’autorité, de ne pas faire assez de miracles. Paul répond à ses contradicteurs en commençant par évoquer avec un peu d’humour une expérience spirituelle, une extase qu’il a eue quatorze ans plus tôt[1]. C’est pour lui une manière de dire : « Si vous voulez qu’on fasse une compétition d’expériences surnaturelles, j’aurais quelques arguments à avancer. » Mais il ajoute aussitôt : « Si j’entrais dans une telle démonstration, je serais un fou. »
Face à ceux qui lui reprochent de ne pas avoir une foi assez démonstrative et spectaculaire, Paul raconte l’expérience d’un échec, d’une prière qui n’a pas été exaucée. Il partage alors une part de son intimité en évoquant une écharde dans sa chair. Nul ne sait ce qu’a été cette écharde, on pense qu’il pouvait s’agir d’une maladie chronique qui le gênait dans l’exercice de son ministère. Paul dit que par trois fois il a supplié le Seigneur de le guérir… et qu’il n’a pas été exaucé. Mais dans son non-exaucement, il a reçu une parole : Ma grâce te suffit ![2] Cette parole a dû lui paraître amère dans un premier temps, mais il a appris à l’accueillir comme une présence de Dieu malgré l’absence de l’exaucement tel qu’il l’attendait. On pourrait parler d’alter-exaucement, c’est-à-dire d’un exaucement différent. Il en a tiré une leçon qu’il revendique devant ses adversaires : Je ne me glorifierai que de mes faiblesses… afin que la puissance de Christ repose sur moi.
Cet épisode joue sur le paradoxe, il nous parle d’une présence de Dieu à accueillir du creux de nos faiblesses, et même jusque dans nos prières non exaucées selon nos attentes.
Ce renversement de l’exaucement me rend l’apôtre Paul proche et fraternel. Il me dit un Dieu qui est à mes côtés dans mes guérisons et dans mes maladies, et qui m’invite à faire de mes épreuves des expériences de grâce.
[1] 2 Co 12.2-4.
[2] 2 Co 12.9.