Quand on cherche à interroger les Écritures face au mal, notre réflexion croise la personne du diable, ou du Satan ou des mauvais esprits ou… quel que soit le nom qu’on lui donne, on ne peut nier que les évangiles parlent de puissances maléfiques. Que pouvons-nous en dire ?

Une des évocations de ces puissances mauvaises dans la Bible se trouve dans les géants qui dans le monde d’avant le déluge ont séduit les filles des hommes (Gn 6.4). Le mot traduit par géants, Niphilim, vient du verbe naphal qui veut dire tomber. Des commentaires ont dit que ces géants étaient des anges qui étaient tombés, des anges déchus. L’interprétation est possible, mais elle ne s’impose pas.

La Bible n’est pas explicite sur l’origine de ces puissances maléfiques, et elle ne commence à en parler qu’à une époque relativement tardive, à partir de la période perse. Nous pouvons interpréter cette apparition comme une réponse à la question du mal. Dans les écrits les plus anciens, la toute-puissance de Dieu était à l’origine de toutes choses, les bonnes et les mauvaises. Est arrivé un moment où il est devenu difficile de croire que le Dieu de la compassion et de la miséricorde puisse être à l’origine des massacres et des épidémies. C’est alors qu’on a vu apparaître l’idée de puissances maléfiques qui expliquent le mal et les maladies.

Faut-il croire au diable ? La foi chrétienne nous appelle à croire en Dieu, le Père, le Fils et l’Esprit ; et non à croire en Satan, au diable et à ses démons. En revanche, la Bible en parle et nous devons entendre ce qu’elle dit. Ses avertissements rejoignent une observation du monde : Il suffit de relire l’histoire de l’humanité pour se convaincre qu’il existe des dynamiques diaboliques, des forces d’orgueil, de mensonge et de haine qui se saisissent des humains spirituellement fragiles. Il est arrivé dans l’histoire que des forces de chaos déferlent sur une région et que de bons voisins deviennent des monstres. Ce qui a fait dire à un observateur politique comme Jacques Julliard : « Il y avait jadis de la candeur à croire au diable. Il y a aujourd’hui de l’aveuglement à ne pas y croire. »

Faut-il croire au diable ? Ce n’est pas la peine de croire au petit bonhomme cornu avec un habit rouge et un trident à la main, de même qu’on ne croit pas en un Dieu qui aurait les traits d’un vieillard à barbe blanche siégeant sur un nuage. En revanche nous devons garder les yeux ouverts sur la dimension spirituelle et démoniaque des forces de division, de haine et de mensonge qui menacent notre société.

Le risque de la période que nous traversons est la menace du chaos et du délitement des principes qui fondent notre vie commune. C’est pourquoi nous devons rester fermement attachés aux valeurs de liberté, de solidarité et de protection des plus fragiles. Ce combat est spirituel.

La bonne nouvelle des Écritures est l’affirmation que Dieu est avec l’humain dans sa lutte contre le chaos.