La pensée arabe est riche de nombreuses œuvres encore méconnues.
Elle offre de ce fait un large champ de recherches, d’édition de manuscrits, de traductions et de commentaires philosophiques.
Ce travail de doctorat porte sur l’une de ces œuvres, le pseudo-al-‘Āmirī Kitāb al- Sa‘āda wa l-Is‘ād(Traité sur le bonheur et les moyens de l’acquérir), œuvre restée quasiment inconnue en Occident. Par sa traduction et son commentaire philosophique, il s’agira de lui restituer la place qu’elle mérite au sein de la tradition philosophique arabe classique, et plus généralement de la tradition philosophique universelle. En effet, cet ouvrage magistral est porteur d’un intérêt particulier, tant par sa méthode que par son contenu.
Outre son intérêt du point de vue de la philosophie morale et politique qui explore les thèmes du bonheur individuel, du perfectionnement de soi, du vivre ensemble, du statut du Prince ainsi que de la relation gouvernants/gouvernés, ce texte aborde le rapport entre la philosophie et la religion, et met constamment la Loi en dialogue avec la Raison. D’où son intérêt pour l’étude de la fondation des normes de conduite dans un contexte que certains chercheurs comme M. Arkoun ont qualifié de période de l’« humanisme arabe ». En effet, le texte s’inscrit dans une pensée humaniste universelle, marquée par une volonté d’étudier l’homme par le biais de tous les champs de savoir et par une adhésion à l’idéal philosophico-littéraire d’une sagesse éternelle : redécouverte des textes antiques, ouverture aux sciences dites rationnelles, recherche de l’acquisition d’une sagesse humaine, volonté de construction d’une cité idéale, interrogations des liens entre pensée rationnelle et pensée religieuse. C’est la recherche d’un savoir méthodique construit par un esprit autonome, la valorisation de l’esprit humain et de la pensée rationnelle, portée par l’idée que l’homme doit se réaliser tant dans son rapport à Dieu (dimension verticale) que dans son humanité (dimension horizontale).
Le texte s’inscrit également dans un genre littéraire particulier, celui de la maxime et des formules brèves. Il se présente comme une collection d’aphorismes des pensées grecque, perse, indienne et arabe et son étude permet donc de travailler sur la question de la transmission des savoirs et de la circulation de la pensée. Le texte traduit une volonté de pérennité et d’universalité d’une « sagesse éternelle », l’affirmation de la nécessité et de la possibilité de se rejoindre dans une sagesse commune à tous les hommes dans tous les temps.
D’où l’utilisation des méthodes de répétitions, de résurgences et de récurrences, ainsi que les constantes références à d’anciennes autorités.
Commencé en 2015, ce travail de recherche touche à sa fin et devrait être soutenu au cours du 1er semestre 2020. Je l’espère être, à son niveau, une porte ouverte sur ce champ de recherche encore trop peu connu qu’est la pensée de langue arabe, une pensée riche et vivante, qui marque encore aujourd’hui l’histoire de la pensée universelle.