Les grands principes du luthéranisme
Dans la grande diversité des protestantismes, le luthéranisme se distingue par trois inflexions.
La doctrine des deux règnes propose une distinction entre le règne temporel du monde qui est régi par la loi et qui est sous l’autorité du magistrat, et le règne spirituel de l’Église régi par la grâce. Ces deux règnes dépendent de Dieu, mais ils induisent une séparation des domaines d’intervention. Dans l’histoire, cette doctrine a parfois conduit les luthériens à avoir une attitude plutôt passive vis-à-vis des pouvoirs politiques. Cette position est à nuancer, car quiconque a bien lu Luther ne peut prendre son parti ni du mensonge ni de l’oppression ni de l’injustice, mais il le fait en tant que citoyen.
Une sensibilité aux sacrements. Au seizième siècle, luthériens et réformés ont essayé de se rapprocher lors du colloque de Marbourg en 1529 auquel ont participé Luther et Zwingli. Une liste de quinze questions était à l’ordre du jour. Les deux réformateurs se sont mis d’accord sur quatorze d’entre elles, mais ils n’ont pas réussi à s’entendre sur le dernier point qui concerne la cène. Les luthériens ont adopté une position intermédiaire entre la doctrine catholique de la transsubstantiation et la doctrine réformée de la présence spirituelle. Pour les luthériens, le pain et le vin de la cène restent pain et vin tout en étant réellement corps et sang du Christ.
Un engagement fort dans le dialogue avec l’Église catholique. Les luthériens ont toujours été à la pointe du dialogue œcuménique et c’est avec eux qu’a été signé en 1999 le texte majeur de la déclaration commune sur la justification par la foi, thème qui est à l’origine de la découverte réformatrice. Par la suite, les réformés et les anglicans ont rejoint cet accord.
Ces différences soulignent la sensibilité luthérienne, mais elles ne sont pas séparatrices d’avec le reste du protestantisme. Les Églises luthériennes et réformées d’Europe ont signé en 1973 la concorde de Leuenberg qui a établi une « pleine communion de chaire et d’autel », c’est-à-dire dans les domaines de la prédication et des sacrements. Cette concorde a rendu possible la création en 2013 de l’Église protestante unie de France.