Garonne, Loire, Rhin, Tamise… Les fleuves européens sont pollués par une « concentration alarmante » de microplastiques. Tel est le constat établi par la Fondation Tara Océan, dans une étude inédite menée depuis 2019. Lumière sur le propos avec Jean-François Ghiglione, Directeur scientifique de la mission Tara Microplastiques.

Les microplastiques sont des petites particules de plastique, souvent invisibles à l’œil nu, qui proviennent de la dégradation de plastiques plus gros, et qui se retrouvent partout dans l’environnement, y compris dans nos fleuves. La fondation Tara Océan a constaté une concentration alarmante de microplastiques dans les principaux fleuves européens, révélant un état préoccupant de leur santé.

A partir du moment où ils commencent à être vraiment tout petits, inférieurs à 5 mm, on considère que ce sont des microplastiques. On les classe ainsi parce qu’on sait que la majorité des animaux qui vivent dans les fleuves ou en mer peuvent ingérer ces petits plastiques. Nous avons été complètement étonnés de la concentration des microplastiques que nous avons retrouvée dans les neuf plus grands fleuves européens. La moyenne sur l’Europe est de 3 microplastiques par mètre cube. Pour vous donner une image, si je mettais un filet, par exemple, sur la Seine, à Paris, qui a un débit de 300 mètres cubes par seconde, j’arriverais à peu près à 900 microplastiques par seconde, qui seraient visibles en face de Notre-Dame par exemple. Donc, en un clin d’œil, j’ai à peu près 900 microplastiques qui passent devant moi quand je regarde un fleuve. Et cela est valable à peu près sur tous les fleuves d’Europe.

Deux scénarios se dessinent : dans le premier, les fleuves sont purifiés, ce qui permettrait une régénération des écosystèmes et une diminution des risques pour la santé humaine. Dans le second, si la pollution continue de s’aggraver, les conséquences pourraient être irréversibles, affectant durablement la biodiversité, la qualité de l’eau et notre environnement quotidien. En 2025, il est encore possible d’arrêter le drame des microplastiques en adoptant des mesures concrètes à tous les niveaux : réduire la production de plastique, promouvoir des alternatives durables, et encourager un changement de comportement à grande échelle, de l’individu aux industries.

Il n’y a pas un animal aujourd’hui qui ne va pas manger du plastique. Et si cela continue à se dégrader, nous allons avoir une pollution de plus en plus importante et des effets évidemment sur la santé de notre environnement. Si demain, nous arrêtons tous les plastiques, il faudra un certain temps pour que les organismes arrivent à épurer les quantités de plastique qui sont encore présentes. Nous voyons un lien direct entre l’augmentation de la production de plastique et la consommation de microplastiques. Le message majeur que nous donnons aujourd’hui, c’est que la seule solution pour réduire la pollution : c’est de réduire cette production de plastique primaire et évidemment de réduire notre consommation de plastique pour les consommateurs.

Tout le monde a un rôle à jouer, des particuliers aux grands professionnels. Cependant, tant que la production et la consommation de plastique continueront, les microplastiques persisteront. Se passer totalement du plastique en 2025 reste difficile, mais une réduction significative de son usage est possible et cruciale pour limiter cette pollution. Chacun peut adopter des gestes simples pour réduire sa consommation de plastique et participer à l’effort de lutte contre la pollution. Il suffit de privilégier des alternatives durables, comme les produits réutilisables, de trier correctement ses déchets, et d’éviter les plastiques à usage unique.

En 2021, une loi a été votée en France dans l’objectif de réduire drastiquement les emballages plastiques d’ici 2040. Pour nous, 2040, c’est vraiment très, très loin mais effectivement, ce sont les emballages, essentiellement, qui sont responsables de la pollution. Si nous enlevons déjà les emballages, nous enlevons déjà 40% du problème. Il ne faut pas imaginer que notre poubelle jaune est une poubelle miracle.

Nous savons que 10% de la poubelle jaune est recyclée, le reste va être enfoui ou incinéré. Donc, 90% des déchets, c’est enfoui, les autres sont incinérés. Et là, aujourd’hui, l’objectif, c’est de réduire notre consommation de plastique et de réduire ce que nous allons mettre à la poubelle. Pendant des années, on nous a leurrés à nous faire croire qu’on pouvait continuer à jeter des effets plastiques dans notre poubelle jaune. Nous savons qu’aujourd’hui, il y en a seulement 10% qui sont traités. Donc, c’est de notre devoir de citoyen aussi, de réduire la quantité de déchets que nous allons produire. Et tout se passe au magasin. Il suffit de changer nos habitudes pour avoir beaucoup moins de plastique.

Un podcast de Phare FM.